Comme ces lois sur la langue ne sont pas le fait d'un seul parti politique, leur adoption successive, en moins de huit ans, sera encore plus significative de la volonté quasi unanime de la majorité francophone de défendre l'usage de la langue française au Québec. En fait, les lois 63, 22 et 101, quoique assez différentes, se situent dans une continuité et un élargissement progressif des préoccupations des législateurs.

D'une loi à l'autre, la valorisation sociale et économique de la langue française prend de l'importance. La préoccupation passe de la langue d'enseignement à la langue de travail. D'une affirmation d'identité, on en vient à une affirmation territoriale, du bilinguisme à l'unilinguisme français. De plus, les mécanismes d'application s'affinent et se complètent. Finalement, les lois, d'abord incitatives, deviennent coercitives (Daoust dans Linteau, 1989).

Le noeud du conflit entre anglophones et francophones provient de la restriction de l'accès à l'enseignement en anglais. Le respect des droits acquis ne suffit pas aux anglophones. Ainsi, leur plus profond désir serait de conserver le statu quo, alors que la grande majorité des immigrants, depuis l'arrivée des Juifs au début du siècle, venait renforcer, augmenter et enrichir leur population de souche britannique.

Certains francophones, pour leur part, deviennent de plus en plus radicaux vis-à-vis la question linguistique et le pouvoir politique. On assiste notamment à l'émergence d'un mouvement clandestin, le Front de Libération du Québec (FLQ), qui choisit l'action violente pour faire entendre sa voix et dont les actions de plus en plus violentes conduiront à la crise d'Octobre de 1970. Il est vrai que la première de ces lois, la loi 63, incidemment connue à ce moment-là sous le vocable de ½bill╗ 63, ce qui en dit long sur l'utilisation de l'anglais à l'époque, est intitulée ½Loi pour promouvoir la langue française au Québec╗. Dans les faits, elle n'a de réellement promotionnel que le nom.