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Text File  |  1996-06-20  |  53KB  |  268 lines

  1. LA CRISE âCONOMIQUE: LES ANNâES DE DâPRESSION DANS LES VILLES 
  2.  
  3. John. H. Taylor 
  4.  
  5.      Dans les annÄes 20, le Canada s'Äloigna de son caractÅre principalement rural pour devenir une nation urbaine: plus de la moitiÄ de la population Ätait regroupÄe dans les villes et villages et ce ╟secteur╚ continuait de croötre. Les changements se manifestaient non seulement par la croissance de la population urbaine, mais aussi par la nouvelle physionomie des villes, les modifications de leur structure socio-Äconomique et l'essor de leurs institutions. MalgrÄ ces transformations Ävidentes, il serait difficile d'Älaborer une typologie du Canada urbain des annÄes 20. Peu de villes se ressemblaient. Chacune Ätait nÄe dans un endroit diffÄrent, ê une Äpoque diffÄrente et pour des raisons diffÄrentes. La croissance et l'essor qui furent leurs par la suite Ätaient pour le moins inÄgaux. Cependant, toutes Ätaient des villes, et qui plus est, des villes en pleine transformation.
  6.  
  7.      En 1929, en plein coeur de cette pÄriode de changements importants, les villes, comme le reste du pays, entrÅrent dans une nouvelle dÄcennie de dÄpression. La crise des annÄes 30 Ätait, de bien des faìons, la premiÅre dÄpression urbaine et, ê l'exception des rÄgions de l'Ouest touchÄes par la sÄcheresse, elle a surtout dÄvastÄ les principaux centres. La rÄaction des villes ê l'action combinÄe du long processus d'adaptation et de la dÄpression fut d'abord chaotique et, en fin de compte, fatale.
  8.  
  9.      La rÄaction fut chaotique parce que les villes Ätaient mal prÄparÄes face ê la crise, et particuliÅrement face au principal phÄnomÅne social qui en dÄcoulait, le chÖmage. Les faibles moyens dont elles disposaient variaient ÄnormÄment d'un endroit ê l'autre. Les villes ne pouvaient donc ni affronter cette crise individuellement, ni coordonner leurs efforts pour agir de front. En outre, dans les annÄes 20, la principale stratÄgie Äconomique des villes avait ÄtÄ de favoriser l'essor du secteur privÄ et aussi de considÄrer la prospÄritÄ Äconomique comme leur panacÄe.
  10.  
  11.      Pendant la dÄpression, la stratÄgie Äconomique fondÄe sur le dÄveloppement et la croissance allait cependant Étre abandonnÄe. C'est son antithÅse, c'est-ê-dire une politique de repli Äconomique, qui fut choisie. PlutÖt que de laisser libre cours ê une concurrence libre qui favoriserait le retour de la prospÄritÄ ou apportait une solution indirecte aux problÅmes sociaux, les villes adoptÅrent une attitude d'autodÄfense et de parcimonie, qui eut plutÖt pour rÄsultat de crÄer plus de chÖmage et donc plus de chÖmeurs.
  12.  
  13.      Malheureusement, le chÖmage, d'aprÅs les lois provinciales ou la coutume, Ätait du ressort des gouvernements locaux et, dans la situation critique provoquÄe par la dÄpression, l'impÖt foncier local, traditionnellement destinÄ ê l'amÄnagement physique de la ville, devait servir ê supporter le fardeau supplÄmentaire que reprÄsentait l'assistance aux chÖmeurs. MalgrÄ d'importantes coupures dans les fonds rÄservÄs ê l'amÄnagement et ê l'administration des villes et malgrÄ les subventions versÄes par les Ächelons supÄrieurs du gouvernement, l'impÖt foncier ne put suffire ê la tëche. La plupart des villes pouvaient faire appel ê d'autres sources de revenu fiscal, comme l'impÖt sur le revenu, mais elles y avaient trÅs peu recours. Pour combler l'Äcart entre la diminution des revenus et l'augmentation du co₧t de leurs charges sociales et autres, la plupart des villes empruntÅrent.
  14.  
  15.      En 1934-1935, la persistance du chÖmage, son co₧t croissant et l'Ächec des efforts destinÄs ê ramener la prospÄritÄ provoquÅrent la montÄe d'un radicalisme politique urbain. Partout au pays, des dirigeants municipaux radicaux commencÅrent ê faire leur apparition. Ces hommes, s'ils avaient trÅs peu de choses sensÄes ê offrir, promettaient au moins d'agir, et ce furent eux qui concoururent ê l'erreur fatale commise par les villes pendant la dÄpression. PlutÖt que d'exiger les ressources financiÅres et le pouvoir indispensables pour faire face aux problÅmes du monde urbain et industriel si cruellement aggravÄs par la crise, ces hommes demandÅrent que les villes soient soulagÄes de leurs responsabilitÄs sociales, plus particuliÅrement des charges envers les chÖmeurs. En fait, ils rÄclamÅrent du gouvernement fÄdÄral le contrÖle fiscal de leurs budgets.
  16.  
  17.      Ces exigences, qui correspondaient en rÄalitÄ ê une vÄritable infÄodation, furent satisfaites de faìon assez curieuse. La solution des problÅmes, sociaux et Äconomiques entre autres, de la sociÄtÄ urbaine moderne fut laissÄe aux villes, tandis que les moyens destinÄs ê les rÄsoudre furent contrÖlÄs de prÅs par les diffÄrents gouvernements provinciaux, soit directement par des rÅglements, soit par une surveillance Ätroite ou par des manoeuvres financiÅres. Lorsqu'ensuite, la population des villes recommenìa ê croötre dans les annÄes 40 et 50, les villes agrandies durent faire face ê l'avenir avec des pouvoirs diminuÄs et des revenus propres insuffisants.
  18.  
  19. Transformation 
  20.  
  21.      La transformation du Canada qui, de sociÄtÄ surtout rurale et prÄ-industrielle, est devenu une sociÄtÄ urbaine et industrielle, s'est manifestÄe par un large Äventail de changements physiques et humains, tout particuliÅrement dans les villes. La croissance des populations urbaines est Ävidemment en soi un aspect important de cette transformation. Ainsi, la population de 14 grandes villes canadiennes est passÄe de 921 687 en 1901 ê 2 765 580 en 1931, soit une augmentation de 300 pour cent. Dans les villes de l'Ouest, des augmentations de plus de 500 pour cent au cours de ces trente annÄes Ätaient chose courante. En 1901, ces 14 villes reprÄsentaient environ 17,3 pour cent de la population du Canada et en 1931, environ 26,7. Pendant la dÄpression, ce sont elles qui allaient comprendre environ la moitiÄ des chÖmeurs et absorber les trois-quarts des co₧ts de l'assistance.
  22.  
  23.      La transformation Ätait tout aussi manifeste dans les modifications touchant la construction urbaine, en particulier par l'adoption et l'Älaboration d'une nouvelle technologie. Tout aussi importantes, mais peut-Étre moins Ävidentes que les changements subis par le milieu physique, furent les transformations de l'organisation Äconomique ainsi que celles des institutions sociales et autres. Ces changements furent en grande partie achevÄs dans les annÄes 20 qui ont vu, en un sens, le couronnement d'une architecture fondÄe sur l'ascenseur Otis et l'utilisation de l'acier et du bÄton. Ce furent ces techniques de construction qui donnÅrent aux villes leurs ╟silhouettes╚ caractÄristiques produites par les ╟gratte-ciel╚ ÄlevÄs comme autant de piÅces montÄes. L'Empire State Building de New York (terminÄ en 1929) est peut-Étre le symbole achevÄ de cette Äpoque, mais les villes canadiennes ont elles aussi des immeubles de ce genre, ê une Ächelle plus modeste, par exemple, le Marine Building de Vancouver (terminÄ ê peu prÅs ê la mÉme Äpoque que l'Empire State Building). Les nouvelles techniques de construction firent naötre dans le centre des villes non seulement les gratte-ciel mais aussi les basses-villes et, avec la prolifÄration des automobiles, leurs encombrements. Par contrecoup, la concentration de la population dans le centre des villes et l'usage de l'automobile furent ê l'origine du dÄveloppement urbain et de ce qui en furent les symboles matÄriels, par exemple le supermarchÄ, un phÄnomÅne des annÄes 30, et les plans d'amÄnagement de vastes quartiers rÄsidentiels.
  24.  
  25.      L'essor fulgurant des moyens de transport fondÄs sur le moteur ê combustion interne a ÄtÄ, Ävidemment, l'un des faits nouveaux qui ont le plus profondÄment marquÄ le milieu physique des villes. Dans les annÄes 20, les vÄhicules motorisÄs commenìaient tout juste ê crÄer les problÅmes devenus si caractÄristiques des villes modernes: encombrements, saletÄ, Ätalement. L'apparition de ces vÄhicules a engendrÄ un appÄtit immense pour les fonds publics affectÄs aux routes, ponts et autres Äquipements. Ils ont aussi imposÄ de plus grandes exigences sur le systÅme nerveux ê cause de ce fait nouveau appelÄ ╟heure de pointe╚ -- contribution de l'automobile ê ce phÄnomÅne particulier de la sociÄtÄ urbaine et industrielle, la migration quotidienne entre le lieu de travail et la rÄsidence.
  26.  
  27.      Au dÄbut du XXe siÅcle, les dÄpenses des gouvernements locaux augmentÅrent rapidement. Dans neuf grands centres pour lesquels les donnÄes sont disponibles, le total des taxes perìues passa de 20,8 millions de dollars en 1911 ê 71,5 millions en 1921, et ê 92,3 millions en 1929. MalgrÄ les efforts faits pour Äconomiser et malgrÄ la contraction de l'assiette de l'impÖt, les co₧ts de l'assistance continuÅrent ê faire monter les impÖts perìus dans les annÄes 30. Pour l'ensemble de ces neuf grands centres, ces co₧ts atteignirent 101,2 millions de dollars en 1934. La plus grande partie de cette somme provenait de l'impÖt foncier qui, selon un Äconomiste municipal, avait pratiquement ÄtÄ exploitÄ au maximum au milieu des annÄes de la dÄpression. On ne pouvait plus rien en tirer. D'autres sources potentielles de taxation, comme l'impÖt sur le revenu, les taxes sur les boissons alcooliques et l'automobile, avaient ÄtÄ progressivement retirÄes aux municipalitÄs par les provinces au cours des annÄes 20 et 30.
  28.  
  29.      La plus grande des recettes fiscales servait ê rembourser les emprunts des trentes premiÅres annÄes du siÅcle qui avaient servi ê la subvention des programmes de travaux publics qui transformÅrent l'aspect extÄrieur de villes. Pendant la dÄpression, il n'Ätait pratiquement plus question d'emprunter pour des travaux de ce genre. Le nombre croissant de chÖmeurs obligea cependant la plupart des municipalitÄs ê poursuivre leurs programmes d'emprunt afin de subvenir aux besoins en matiÅre d'assistance. En consÄquence, la dette publique demeura stable ou s'accrut. Autre source de difficultÄs, l'argent ╟ê bon marchÄ╚ empruntÄ avant 1929 dut Étre remboursÄ avec l'argent ╟cher╚ de l'Äpoque de la dÄpression. Ainsi, les municipalitÄs devaient faire face ê un Äcart grandissant entre les revenus qu'elles pouvaient retirer et les dÄpenses qu'elles devaient effectuer. C'est de ce problÅme que se plaignirent surtout les municipalitÄs dans les annÄes 30. S'y ajoutaient certains problÅmes d'ordre humain.
  30.  
  31.      Pendant la dÄpression, les victimes de la sociÄtÄ industrielle -- les chÖmeurs -- avaient besoin des fonds publics simplement pour survivre, alors que cet argent devait d'abord servir ê rembourser la dette contractÄe pour moderniser la ville, entreprise dont les principaux avantages profitaient surtout aux riches. Enfin, autre facteur liÄ ê ce problÅme, la multiplication des nouvelles techniques augmenta la complexitÄ de la sociÄtÄ urbaine et accrut la vulnÄrabilitÄ de l'individu obligÄ de se tirer d'affaires sans aide. De plus en plus de gens, particuliÅrement ê l'occasion d'une crise, Ätaient tout ê fait incapables de subvenir ê leurs besoins, mÉme les plus ÄlÄmentaires, comme la nourriture et le logement. Il leur fallait compter sur les autres -- d'abord, les riches enclins ê la gÄnÄrositÄ et enfin, le secteur public. La technologie augmentait non seulement la complexitÄ des rapports avec le milieu, mais aussi, ce qui est plus important, elle ajoutait ê la complexitÄ des rapports Äconomiques et sociaux et, en fin de compte, renforìait le rÖle du gouvernement et d'autres institutions qui allaient appuyer ces rapports et servir de rÄgulateur.
  32.  
  33.      Sur le plan des rapports Äconomiques, la pÄriode qui a prÄcÄdÄ et qui a suivi la PremiÅre Guerre mondiale semble avoir ÄtÄ marquÄe par une rÄorganisation majeure de l'Äconomie. ╦ cet Ägard, les annÄes vingt ont vu l'emphase de l'Äconomie nationale passer du blÄ aux pëtes, au papier et aux mÄtaux de base, des sources d'Änergie comme le charbon et le bois au pÄtrole et ê l'ÄlectricitÄ, et des moyens de transport ferroviaires ê l'automobile. On assistait aussi ê cette Äpoque ê une augmentation trÅs forte, et particuliÅrement prononcÄe en milieu urbain, de la main-d'oeuvre employÄe dans l'industrie tertiaire. (Voir tableau 1). De plus en plus, les gens entraient dans le secteur des services o¥ ils ont constituÄ la sociÄtÄ dite des ╟bureaucrates╚ qui tient une place si importante dans la ville moderne. En outre, il y eut ê cette Äpoque une rationalisation de grande envergure de la fabrication dans les grandes villes. Le nombre d'entreprises dans ces centres diminua considÄrablement avant et pendant les annÄes 20 et, dans certaines villes, il n'y avait plus ê la fin de cette dÄcennie que la moitiÄ des Ätablissements industriels qui y existaient au dÄbut. Le nombre de travailleurs dans les diffÄrentes catÄgories d'emplois manufacturiers dÄclina Ägalement tandis que le capital investi augmentait. (Voir tableau 2). Ainsi, les fabriques devenaient plus grosses, elles utilisaient plus de machines et moins de main-d'oeuvre, et leur production Ätait plus ÄlevÄe. Il y eut effectivement dans les annÄes 20 un bouleversement complet des facteurs salaires, prix et production. Il semble en Étre rÄsultÄ un immense rÄservoir de main-d'oeuvre, marginale et dÄsoeuvrÄe -- en un sens, les victimes de l'ëge de la mÄcanisation, qui allaient devenir dans les annÄes 30 les laissÄs-pour-compte de la dÄpression.
  34.  
  35.  Tableau 1:
  36.  
  37.      Ratio de pourcentages dans les diffÄrentes professions: principales villes du Canada 
  38.                             1931/1921
  39.  
  40.                         Manuf.      Cons.      Trans.
  41.  
  42. Hamilton             890        1.035       1.305 
  43. Montreal            .793        1.105       1.128 
  44. Ottawa             1.058        1.080         .952 
  45. Quebec              .804         1.111      1.076 
  46. Toronto              .860          .984       1.142 
  47. Vancouver         .914         1.042       1.148 
  48. Winnipeg         1.018         1.021        .911 
  49.  
  50.  
  51.                           Comm.           Ser. prof. 
  52.  
  53. Hamilton              .945                1.160 
  54. Montreal              .854                1.000 
  55. Ottawa                 .920                 1.300 
  56. Quebec                .854                   .952 
  57. Toronto                .854                 1.225 
  58. Vancouver           .898                   .903 
  59. Winnipeg             .779                1.107 
  60.  
  61.  
  62.                  Ser. pers.  bureau  Man-oeuvres
  63.  
  64. Hamilton       1.425       .756         1.045 
  65. Montreal       1.462       .886         1.271 
  66. Ottawa           1.508       .817        1.005 
  67. Quebec         1.451       .942         1.430 
  68. Toronto         1.555       .886         1.083 
  69. Vancouver    1.110        .797        1.205 
  70. Winnipeg      1.478        .803        1.305 
  71.  
  72. Un indice supÄrieur ê 1.000 signifie une augmentation numÄrique relative pour une profession en particulier dans une ville en particulier, et un indice infÄrieur ê 1.000 indique l'inverse.
  73. Il n'existe de donnÄes comparables que pour les sept villes ÄnumÄrÄes ci-dessus.
  74.  
  75.  
  76.  Tableau 2:
  77.  
  78.      Nombre d'entreprises et capital investi: principales villes du Canada 1920, 1930, 1936 
  79.  
  80.   --1920--             Nombre            Capital
  81.                                                  $ x 10 000
  82. Halifax                   315                25 485 
  83. Saint-Jean (N.-B)    302               15 814 
  84. QuÄbec                  443                42 021 
  85. MontrÄal              2832              471 488 
  86. Ottawa                    552               49 619 
  87. Hamilton                 795             144 764 
  88. London                   464                36 090 
  89. Toronto                 3383             453 264 
  90. Winnipeg                911             100 372 
  91. Regina                    173               12 934 
  92. Saskatoon              173                 7 136 
  93. Calgary                   332               26 151 
  94. Edmonton               306                17 754 
  95. Vancouver             1065               85 805 
  96.  
  97.   --1930--             Nombre            Capital
  98.                                                  $ x 10 000
  99. Halifax                    100               21 049 
  100. Saint-Jean (N.-B.)    126               24 886 
  101. QuÄbec                    243               68 154 
  102. MontrÄal                1825             485 332 
  103. Ottawa                      208              57 296
  104. Hamilton                  439             214 227 
  105. London                     228              46 839 
  106. Toronto                   2320            524 162 
  107. Winnipeg                  519            123 782 
  108. Regina                        84              35 487 
  109. Saskatoon                   64               9 529 
  110. Calgary                     153              35 701 
  111. Edmonton                 153              24 760 
  112. Vancouver                 681           128 685 
  113.  
  114.   --1936--             Nombre            Capital
  115.                                                  $ x 10,000
  116. Halifax                    94                  23 835 
  117. Saint-Jean (N.-B)   118                 18 122 
  118. QuÄbec                  286                 46 761 
  119. MontrÄal              2372               389 225 
  120. Ottawa                   200                 33 112 
  121. Hamilton                466               176 519 
  122. London                  237                 38 301 
  123. Toronto                2762               396 258 
  124. Winnipeg              594                  71 757 
  125. Regina                    95                    9 709 
  126. Saskatoon               66                   7 205 
  127. Calgary                  161                 27 497 
  128. Edmonton              168                 17 489 
  129. Vancouver             807                 83 199 
  130.  
  131.  
  132.      Dans le domaine des rapports sociaux, un processus d'Älimination parmi la population des villes sembla s'Étre achevÄ. Ce remaniement avait commencÄ ê se manifester dans certains grands centres vers l'Äpoque de la formation de la ConfÄdÄration et apparaöt comme une consÄquence de l'accroissement numÄrique, des pressions dÄcoulant d'une sociÄtÄ industrielle et urbaine au Canada et du dÄveloppement des moyens de transport interurbains, en particulier le tramway ê traction animale et le tramway Älectrique. Dans les petites agglomÄrations urbaines de l'Åre ╟prÄ-industrielle╚, on pouvait constater un mÄlange hÄtÄrogÅne de gens et de types d'activitÄs prÅs du centre des villes. Riches et pauvres, protestants et catholiques, irlandais et anglais vivaient les uns prÅs des autres. En outre, les diffÄrentes composantes Äconomiques, commerce, industrie et habitations, se trouvaient rÄunies pÉle-mÉle.
  133.  
  134.      Toutefois, dans la ville moderne en train de se dÄvelopper, il semble s'Étre produit trois changements majeurs. Il y eut d'abord l'Äloignement du lieu de rÄsidence et du lieu de travail et, par voie de consÄquence, l'afflux biquotidien des voyageurs arrivant au travail et retournant ê la maison. Il y eut, en deuxiÅme lieu, la formation de secteurs se distinguant par une branche d'activitÄs: un centre caractÄrisÄ par le commerce et les magasins de dÄtail; tout prÅs, des secteurs distincts pour les fabriques et les entrepÖts; d'importantes zones rÄservÄes aux transports navals et ferroviaires; enfin, un certain nombre de quartiers rÄsidentiels. TroisiÅmement, les quartiers rÄsidentiels se diffÄrenciÅrent selon des facteurs comme la culture ou le revenu, ou selon une combinaison des deux, pour former les quartiers ou banlieues de la ville moderne appelÄs quartier nord, quartier est, Rosedale, Westmount, Cabbagetown.
  135.  
  136.      Ces diffÄrenciations Ävidentes -- qui marquÅrent et le monde des affaires et les secteurs d'habitation -- se produisirent dans bon nombre de villes canadiennes, de faìon partielle toutefois dans certaines d'entre elles et jamais deux fois de la mÉme faìon. Les forces ê l'oeuvre dans la nouvelle sociÄtÄ urbaine et industrielle furent freinÄes par la persistance de l'environnement et de l'organisation sociale de la vieille sociÄtÄ ╟prÄ-industrielle╚. Les vieilles structures, comme les vieux immeubles, ne furent jamais ÄliminÄes au cours de cette pÄriode de transformations saisissantes, il y eut plutÖt interpÄnÄtration et modifications au cours d'une pÄriode assez longue. D'autres obstacles, d'origine historique, ajoutÅrent ê la complexitÄ de la nouvelle situation, comme le mÄlange des populations dans chaque centre, ses types d'activitÄ Äconomique traditionnels et sa topographie particuliÅre.
  137.  
  138.      L'impact des transformations urbaines et industrielles -- la croissance de la population, la poussÄe de la technologie, la rÄorganisation Äconomique et sociale -- crÄÅrent des problÅmes, dont certains ont dÄjê ÄtÄ invoquÄs. Ces problÅmes, il va de soi, entraönÅrent la recherche de solutions. En fait, au cours de la pÄriode qui prÄcÄda et suivit immÄdiatement la PremiÅre Guerre mondiale, il y eut une vÄritable floraison de solutions proposÄes d'abord par des rÄformistes sociaux amateurs et, par la suite, par des spÄcialistes de toutes sortes. Effectivement, c'est ê ce moment de l'histoire canadienne que nous constatons l'Ämergence du technocrate, de l'expert, du spÄcialiste et du planificateur, habitants typiques des villes.
  139.  
  140.      L'un des principaux moyens utilisÄs pour trouver des solutions aux problÅmes urbains consista ê effectuer des enquÉtes, et celles qui ont ÄtÄ faites au dÄbut du XXe siÅcle fournissent d'utiles informations historiques sur ce qu'Ätaient les villes et sur ce qu'elles devaient Étre selon leurs auteurs. Les diffÄrents relevÄs dÄmographiques et enquÉtes d'urbanisme, quoiqu'ils aient surtout portÄ sur les conditions d'habitat ou l'organisation matÄrielle de la ville, n'en ont pas moins habituellement ÄvoquÄ les conditions de vie. Les problÅmes de santÄ et de sÄcuritÄ sociale -- entre autres, les maladies contagieuses, les mauvaises conditions d'hygiÅne, l'enfance dÄlinquante, l'ivrognerie, les familles dÄsunies et le chÖmage -- Ätaient d'ordinaire soulignÄs et les divers rapports ne manquaient jamais de relever la coòncidence entre le milieu physique bruyant et les problÅmes sociaux et mÄdicaux constatÄs dans la populations.
  141.  
  142.      Au moment de la PremiÅre Guerre mondiale, les enquÉtes et les efforts d'organisation des rÄformistes sociaux et urbains commenìaient ê se concrÄtiser pour former des Ätablissements officiels, parfois au sein du secteur public, mais le plus souvent dans le secteur privÄ. Des organismes sociaux et de planification urbaine commenìaient ê apparaötre ê l'Ätat embryonnaire dans les annÄes 20, pour rÄpondre ê la croissance gÄographique et Äconomique rapide des centres urbains. Toutefois, avec le Krach de 1929, ils ne purent rÄpondre aux attentes, notamment ê celles de la victime toute dÄsignÄe de l'Åre urbaine et industrielle: le travailleur en chÖmage.
  143.  
  144.      Les gouvernements, qui auparavant n'avaient fait que s'occuper un peu d'assistance aux victimes du monde industriel moderne, furent amenÄs, par la misÅre des chÖmeurs, ê se lancer sans retenue dans le domaine des services sociaux et de l'organisation sociale. Les services de sÄcuritÄ publique ou sociale furent mis sur pied ou prirent de l'expansion ê tous niveaux de gouvernement au cours de la dÄpression qui suivit le Krach et s'implantÅrent solidement au sein des bureaucraties publiques. Ces bureaux, ainsi que les services d'amÄnagement, furent bientÖt remplis d'╟experts╚. En effet, dans les annÄes 30, bon nombre de municipalitÄs engagÅrent leurs premiers travailleurs sociaux et planificateurs diplÖmÄs.
  145.  
  146. Le chaos 
  147.  
  148.      L'Ävolution du milieu physique et humain, ainsi que les efforts faits pour s'adapter aux changements, faisaient partie d'un lent processus de maturation dans lequel se trouvait le Canada au dÄbut du XXe siÅcle. Bon nombre de ces changements touchÅrent les villes canadiennes. En plein milieu de cette Ävolution, ê la fin de l'automne 1929, la plus grande partie du monde, y compris le Canada, fut prÄcipitÄe dans la dÄpression qu'on appela ici la grande Crise (╟Dirty Thirties╚). Les Canadiens avaient dÄjê eu ê subir des dÄpressions, mais jamais un tel effondrement Äconomique n'avait frappÄ si largement le pays, ê une Äpoque o¥ tant de gens vivaient dans tant de villes et o¥ il existait si peu de moyens matÄriels pour compenser la perte d'un emploi.
  149.  
  150.      Les Canadiens Ätaient mal prÄparÄs. Ils n'avaient pas encore rÄussi ê s'imprÄgner de ces changements de longue haleine. Ils s'Ätaient habituÄs ê la prospÄritÄ industrielle et ils la considÄraient comme la solution de la plupart de leurs problÅmes. Il se comportaient ê cet Ägard comme les habitants de la plupart des autres pays industrialisÄs. En fait, au Canada comme ailleurs, la stratÄgie sociale et Äconomique consistait presque exclusivement ê s'appuyer sur la poursuite de l'expansion pour rÄsoudre les problÅmes sociaux et Äconomiques du monde moderne. Le progrÅs et la croissance, ce qui comprenait les innovations techniques, Ätaient considÄrÄs comme la solution principale de la plupart des problÅmes matÄriels et sociaux. Ce que l'homme ne pouvait rÄgler seul, la science et la technologie s'en chargeraient.
  151.  
  152.      Dans les centres urbains du Canada, les conseils municipaux avaient consacrÄ leurs efforts ê l'amÄnagement du milieu physique dans lequel le commerce pourrait prospÄrer, et firent tout les efforts nÄcessaires pour secourir les victimes les plus dÄmunies de la nouvelle sociÄtÄ. La principale source de revenus pour ces initiatives ê portÄe limitÄe Ätait l'impÖt foncier qui, ê tout prendre, Ätait suffisante en temps de prospÄritÄ.
  153.  
  154.      La dÄpression balaya ce systÅme rassurant. Elle rÄduisit ê nÄant la principale solution aux problÅmes de la ville moderne: la prospÄritÄ. Les villes, qui ne disposaient mÉme pas de moyens ou d'organisations leur permettant de faire face ê une crise Äconomique et sociale majeure, Ätaient arrivÄes ê un carrefour dangereux. La crise Äconomique, se superposant ê d'importants changements de longue durÄe dont les effets sur le systÅme social et l'urbanisme ne s'Ätaient pas encore entiÅrement manifestÄs, crÄait des obstacles presque insurmontables.
  155.  
  156.      Le premier rÄflexe des conseils municipaux face aux problÅmes sociaux de la dÄpression fut de considÄrer les chÖmeurs comme le rÄsultat d'une immigration excessive ou de se convaincre que la dÄpression n'Ätait qu'une rÄcession temporaire et qu'elle se terminerait bientÖt. Leur premiÅre rÄaction fut donc de faire appel au gouvernement fÄdÄral -- puisque l'immigration relevait de ce dernier -- pour assimiler le fardeau que reprÄsentaient les chÖmeurs. Toutefois, la responsabilitÄ de ce problÅme Ätait, selon la loi ou l'usage, celle des gouvernements locaux, et ni le gouvernement fÄdÄral ni les provinces n'allaient intervenir ê la demande de ces derniers. Il devint bientÖt Ävident que le chÖmage n'Ätait pas d₧ ê une immigration trop forte et, qui plus est, qu'il ne disparaötrait pas tout seul. La rÄcession Ätait une vÄritable dÄpression. Sans autre appui qu'une aide financiÅre des gouvernements supÄrieurs, et avec la dÄfaillance des organismes privÄs au dÄbut de la dÄpression, les gouvernements locaux, notamment ceux des municipalitÄs, se trouvaient en face d'un problÅme que ne pouvaient rÄsoudre des mesures temporaires et ad hoc.
  157.  
  158.      La premiÅre rÄaction sur le plan Äconomique fut encore plus inconsidÄrÄ. Son seul effet fut d'aggraver la situation. Comme on l'a vu, la principale doctrine Äconomique des annÄes 20 consistait ê compter sur l'expansion, ce qui signifiait pour les villes lutter pour obtenir leur part de cette expansion et de la prospÄritÄ qui en dÄcoulait. Toutefois, pendant la dÄpression, la sagesse traditionnelle voulait qu'on fasse l'inverse, c'est-ê-dire qu'on applique des mesures d'Äconomie et des restrictions et qu'on mette la localitÄ autant que possible ê l'abri des effets secondaires de la dÄpression. Ainsi, il devint pratique courante dans la plupart des villes d'Äconomiser de toutes les faìons possibles et d'empÉcher l'entrÄe des indÄsirables, c'est-ê-dire surtout les chÖmeurs et les concurrents des hommes d'affaires locaux. Les budgets municipaux furent diminuÄs, les emprunts pour les Äquipements furent rÄduits, des employÄs furent mis ê pied et les traitements, diminuÄs. Des rÅglements discriminatoires furent adoptÄs ê l'Ägard des non-rÄsidents et des travailleuses. Les services publics furent limitÄs autant que possible et certaines municipalitÄs en vinrent ê Äteindre un rÄverbÅre sur deux. L'Äquipement usagÄ n'Ätait pas remplacÄ et on n'en achetait pas de nouveau. Des campagnes furent lancÄes pour rendre plus honnÉtes et plus efficaces les gouvernements municipaux. Elles furent suivies le moment venu par d'autres mesures destinÄes ê Äliminer les parasites de l'Äconomie, par exemple dans les domaines du jeu et de la prostitution, et ê dÄtruire les prÄtendus monopoles, notamment les soi-disant trusts du lait, du charbon et du pain. L'inefficacitÄ, la malhonnÉtetÄ, et la monopolisation qui pouvaient Étre tolÄrÄes lorsque tout allait bien devenaient insupportables en temps de crise. Le rÄsultat en fut bien entendu le ralentissement d'une Äconomie dÄjê affaiblie.
  159.  
  160.      Comme la dÄpression entrait dans une deuxiÅme, une troisiÅme et une quatriÅme annÄes, mÉme les plus optimistes durent se rendre ê l'Ävidence: le redressement serait long, lent et pÄnible, et il faudrait faire les efforts nÄcessaires pour se protÄger contre de futures dÄpressions. Il devint Ävident que les chÖmeurs n'Ätaient pas responsables de la perte de leur emploi, ni de leurs difficultÄs ê en trouver un autre. Il semblait que la dÄpression Ätait un corollaire inÄvitable de la prospÄritÄ dans la nouvelle sociÄtÄ urbaine. Les longues listes de chÖmeurs dÄmontraient nettement les pÄnibles consÄquences de la dÄpression, et les nombreux rassemblements, Ämeutes et mÄmoires des organisations de chÖmeurs et des autres ÄlÄments activistes politiques montraient avec tout autant de clartÄ les consÄquences Äventuelles d'un refus d'admettre leur misÅre.
  161.  
  162.      On fit finalement des efforts dans la plupart des villes (et au niveau des gouvernements supÄrieurs) pour organiser une distribution rationnelle et adÄquate de l'assistance, peut-Étre mÉme sur une base permanente. Il Ätait devenu Ävident que la collectivitÄ allait devoir prendre en charge les mesures d'assistance et en payer le prix, malgrÄ l'axiome des annÄes 20 d'aprÅs lequel l'individu devait pourvoir ê ses propres besoins et celui des annÄes 30, d'aprÅs lequel les gouvernements devaient rÄduire leurs dÄpenses en temps de crise. Il fallait admettre cette dure rÄalitÄ des annÄes 30: les victimes de la sociÄtÄ urbaine et industrielle avaient besoin d'une aide publique, sinon c'Ätait la famine. Il s'agissait finalement de dÄcider quel gouvernement allait s'occuper de ceux qui souffraient de l'effondrement de l'Äconomie et lequel allait en payer le prix.
  163.  
  164.      Comme on l'a dÄjê vu, les administrations locales Ätaient censÄes avoir la premiÅre responsabilitÄ dans la mise sur pied et le financement des services sociaux de toutes sortes en l'absence d'organismes dus aux initiatives individuelles ou aux bÄnÄvoles. Mais ê cause de la multitude des chÖmeurs et du co₧t Änorme qui en dÄcoulait, les ressources du secteur privÄ, puis celles des gouvernements locaux, y compris les grandes villes, ne purent suffire ê la tëche. Ils ne disposaient ni de l'organisation sociale nÄcessaire pour faire face au problÅme du chÖmage, ni des moyens financiers qui le leur auraient permis. Ils dÄpendaient de l'impÖt foncier, impÖt qui avait dÄjê ÄtÄ fortement exploitÄ dans les annÄes 20.
  165.  
  166.      Dans les villes, le problÅme Ätait particuliÅrement aigu. Non seulement s'Ätaient-elles lancÄes dans des projets d'expansion au cours des annÄes 20, ce qui avait exigÄ d'elles de trÅs grands efforts financiers, mais elles Ätaient aussi responsables de la plus grande partie du chÖmage qui sÄvissait au pays dans les annÄes 30. D'un cÖtÄ, il y avait la multitude des chÖmeurs, qu'il fallait nourrir et ê qui il faudrait, un jour, trouver un emploi malgrÄ le co₧t Änorme que cela supposait, et de l'autre, les contribuables, encore plus nombreux, qui avaient un emploi et qui, dans cette dizaine d'annÄes o¥ l'insÄcuritÄ dans le domaine de l'emploi Ätait exceptionnelle, devaient rÄgler la note, toujours plus lourde, de l'assistance.
  167.  
  168. RÄactions 
  169.  
  170.      Cette tension, cette incertitude et cette insÄcuritÄ furent ê l'origine du principal phÄnomÅne politique qui se manifesta dans les villes au cours de la dÄpression -- les maires radicaux de 1934-1935. Ils surgirent partout au milieu de cette pÄriode de crise, phÄnomÅne qu'on peut peut-Étre comparer ê celui qui se produisit aux niveaux fÄdÄral et provinciaux. Ces maires semblaient avoir en commun une popularitÄ qui transcendait les diffÄrences entre l'employÄ et le chÖmeur, le riche et le pauvre, le traditionnel Anglais protestant et ╟l'immigrant╚. Ils possÄdaient aussi une sorte de dynamisme qui semblait promettre une forme d'action radicale susceptible de mettre fin une fois pour toutes aux souffrances de cette pÄriode difficile.
  171.  
  172.      ╦ MontrÄal, par exemple, il y eut Camilien Houde, un ╟homme du peuple╚, petit (cinq pied sept pouces) et rondelet (267 livres), issu de quelque rue obscure de MontrÄal et qui parvint aux postes de maire de la ville et de chef du parti conservateur provincial. Au dÄbut de la dÄpression, il crÄa lui-mÉme un embryon de ╟parti╚ politique municipal dont les membres Ätaient appelÄs ╟les partisans de Houde╚. Il entra en lutte ê la fois avec les chefs fÄdÄraux et provinciaux au sujet de l'autonomie de MontrÄal et il attribua en grande partie la dÄpression au dÄclin de la moralitÄ dont la cause Ätait le ╟matÄrialisme╚ propre ê la compagnie ê responsabilitÄ limitÄe qui Ätait alors en pleine croissance. Ces facteurs entre autres, sans compter une crise de l'assistance publique ê MontrÄal en 1933-1934, amenÅrent Houde ê collaborer avec d'autres maires ayant le mÉme style radical, sinon les mÉmes convictions.
  173.  
  174.      Il y avait parmi eux James Simpson, maire de Toronto en 1935, et John Queen, maire de Winnipeg. Tous deux Ätaient des ╟socialistes╚ affiliÄs au parti naissant du C.C.F. (Cooperative Commonwealth Federation). Tous deux, ê la diffÄrence de Houde, ressentaient le besoin d'une rÄorganisation fondamentale sur le plan Äconomique et social plutÖt que d'un rÄtablissement de la santÄ morale, mais, comme lui, ils Ätaient en faveur d'une action globale. Dans les Prairies, apparurent aussi CornÄlius ╟La Taule╚ Rink, maire de Regina, ferme partisan de la mÄthode du travail symbolique -- dans son cas, le cassage des pierres par les bÄnÄficiaires de l'assistance; et Joe Clarke ╟Le Batailleur╚, maire d'Edmonton, qui attaquait avec la mÉme Änergie socialistes, commerìants du centre-ville et ╟intÄrÉts╚ de l'Est et recherchait l'appui des ouvriers, des employÄs du commerce de dÄtail et des vÄritables fanatiques du sport.
  175.  
  176.      Vancouver fut reprÄsentÄ par Gerry McGeer, libÄral ╟indÄpendant╚, qui, issu de la classe ouvriÅre de l'est de la ville, s'Äleva jusqu'ê la haute sociÄtÄ de Vancouver. McGeer croyait en la puissance de Dieu, aux idÄes d'Abraham Lincoln et aux expÄriences financiÅres comme celles prÖnÄes par le CrÄdit social. Vers la fin de la pÄriode o¥ il exerìa les fonctions de maire, il en vint ê croire qu'il serait assassinÄ pour ses politiques monÄtaires peu orthodoxes, tout comme, d'aprÅs lui, l'avait ÄtÄ Lincoln.
  177.  
  178.      Ces chefs urbains Ätaient nettement anti-conformistes et nettement diffÄrents l'un de l'autre. Tous Ätaient cependant des activistes turbulents qui avaient obtenu le pouvoir en promettant des mesures radicales. Au fond, le radicalisme reposait sur un dÄsir exprimÄ de rÄcrire deux types de convention ancienne: l'Acte de l'AmÄrique du Nord britannique et la multitude de contrats intervenus au Canada entre emprunteurs publics et prÉteurs privÄs. C'est ainsi que les maires s'en prirent, quoiqu'indirectement, au caractÅre sacrÄ de la constitution et ê celui des contrats dans un effort destinÄ ê aider les municipalitÄs dÄsemparÄes et les masses de chÖmeurs qui y habitaient. ConcrÅtement, ces attaques consistaient ê demander des prÉts de conversion du Dominion leur permettant de rembourser leurs dettes ê un taux d'intÄrÉt moins ÄlevÄ et ê faire accepter au gouvernement fÄdÄral l'entiÅre responsabilitÄ ê l'Ägard des chÖmeurs. Le prÉt de conversion permettrait aux municipalitÄs de rompre les contrats onÄreux passÄs avec des prÉteurs privÄs et de se dÄcharger en partie du poids accablant de leurs dettes. Toutefois, un prÉt de ce genre supposait aussi un certain contrÖle du gouvernement fÄdÄral sur les dÄpenses des municipalitÄs. Ce contrÖle venait directement ê l'encontre de la compÄtence reconnue aux provinces par l'Acte de l'AmÄrique du Nord britannique en matiÅre de gouvernements locaux. De plus, selon le mÉme acte, l'immixtion du gouvernement fÄdÄral dans le domaine de l'assistance aux chÖmeurs empiÅterait sur la compÄtence des provinces en matiÅre de services sociaux.
  179.  
  180.      C'est lors de la ConfÄrence des maires du Canada tenue ê MontrÄal ê la fin du mois de mars 1935 que s'exprimÅrent avec le plus de force les dÄsirs des maires. Cette confÄrence Ätait organisÄe et menÄe par les dirigeants des grandes villes du pays. Le slogan ╟Relief from Relief╚ (Assistance pour l'assistance) Ätait l'expression de deux demandes, l'une impossible ê satisfaire, et l'autre, funeste. La premiÅre, comme on l'a vu, consistait en un remaniement des contrats financiers et de la constitution canadienne. Les gouvernements fÄdÄral et provinciaux n'Ätaient pas trÅs empressÄs d'y donner suite. La deuxiÅme, aux consÄquences funestes, consistait ê soulager les villes d'une responsabilitÄ sociale -- celle du chÖmage -- tout en leur imposant un certain degrÄ de contrÖle financier de la part du gouvernement fÄdÄral -- selon les modalitÄs prÄvues par les prÉts de conversion. Une autre possibilitÄ avait dÄjê ÄtÄ prÄconisÄe par les villes dans les annÄes 20 et au dÄbut des annÄes 30. Selon celle ci, les trois niveaux de gouvernement nÄgocieraient une nouvelle rÄpartition des responsabilitÄs et des ressources financiÅres afin de faire face aux difficultÄs nÄes de l'Ämergence de l'Åre urbaine et industrielle. Toutefois, en 1935, la volontÄ d'agir, sous quelque forme que ce soit, avait remplacÄ les calmes discussions. Pendant la crise, plutÖt que de faire face ê leurs problÅmes, les villes s'exprimaient sans rÄserve en faveur de leur propre abdication. D'une certaine faìon, les maires des grandes villes furent les principaux auteurs de l'infÄodation des municipalitÄs.
  181.  
  182.      Cette stratÄgie eut des consÄquences funestes. En fin de compte, le soin de s'occuper du chÖmage revenait aux villes qui Ätaient chargÄes de l'administration, tandis que le contrÖle effectif et la mise en oeuvre des grandes politiques passaient aux gouvernements provinciaux. En outre, la plus grande partie du financement Ätait fournie par les deux gouvernements supÄrieurs. Les municipalitÄs gardaient les responsabilitÄs, sans avoir ni la compÄtence, ni les moyens de contrÖle. Ce modÅle, une fois Ätabli, fut Ätendu ê toute une sÄrie de problÅmes urbains propres ê la sociÄtÄ moderne, des embouteillages aux problÅmes de santÄ. En effet, ce systÅme sÄparait les problÅmes urbains, dont les villes continuaient de s'occuper, et les moyens financiers ainsi que les pouvoirs de les rÄsoudre, qui appartenaient aux gouvernements provinciaux et, dans une certaine mesure, fÄdÄral. En principe, les villes Ätaient dÄpouillÄes de la plus grande partie de leur autonomie et du pouvoir de rÄsoudre leurs problÅmes ê leur faìon. AprÅs la Seconde Guerre mondiale, le recul subi par les villes semblait mineur ê cause de la prospÄritÄ qui rÄgnait, mais, en raison de la crise qui atteint les villes ê notre Äpoque, il apparaöt de nouveau dans toute son ampleur.
  183.  
  184. Annexe A: Types d'assistance dans les villes 
  185.  
  186.      Les diffÄrentes formes d'assistance variaient ÄnormÄment d'une ville ê l'autre avant la dÄpression, mÉme si certaines grandes orientations apparaissaient au niveau des rÄgions. Les provinces maritimes comptaient surtout sur un systÅme d'assistance publique, avec un systÅme parallÅle d'oeuvres privÄes, limitÄ et assez peu organisÄ. Au QuÄbec, l'aide provenait presque exclusivement d'oeuvres de bienfaisance privÄes organisÄes par les diverses âglises (catholique romaine, protestante et juive) et financÄes en partie par les fonds publics. Dans les villes ontariennes, un secteur privÄ particuliÅrement solide en matiÅre de sÄcuritÄ sociale prÄdominait, mais un systÅme public relativement complexe Ätait en train de se dÄvelopper. Dans la plupart des villes de l'Ouest, le secteur public au niveau municipal avait tendance ê prÄdominer ê cause des crises financiÅres qui avaient touchÄ le secteur privÄ avant la PremiÅre Guerre mondiale, mais les services sociaux y Ätaient habituellement absents.
  187.  
  188.      Presque au dÄbut de la dÄpression, le secteur privÄ fut submergÄ par l'Änorme problÅme du chÖmage. Le gros des responsabilitÄs en matiÅre de sÄcuritÄ sociale revint aux gouvernements locaux, tandis que les organismes privÄs comblÅrent certaines lacunes (fourniture de vÉtements ou secours aux Orientaux ê Vancouver) et continuÅrent d'oeuvrer dans certains domaines de la sÄcuritÄ sociale (comme l'aide aux enfants). Les responsabilitÄs assumÄes ê l'Ägard des chÖmeurs dans les annÄes 30 incitaient ê la rationalisation des services d'assistance offerts par le secteur privÄ au niveau local au milieu de cette pÄriode. La rÄglementation imposÄe par les gouvernements supÄrieurs contribua aussi ê uniformiser la rÄpartition de l'assistance dans tout le pays. MalgrÄ tout, il existait encore une diversitÄ considÄrable, comme le montrent les donnÄes extraites d'une enquÉte du Conseil canadien du bien-Étre sur les barÅmes d'aide et l'assistance (1936-1937):
  189.  
  190.      MontrÄal: Fournit nourriture, combustible, vÉtements, logement, Äclairage Älectrique et soins mÄdicaux aux familles qui reìoivent une aide directe; les personnes seules ne reìoivent cependant rien pour le combustible ou l'Äclairage Älectrique. Une commission mÄdicale surveille l'attribution de l'aide accordÄe pour les soins de santÄ . . .
  191.  
  192.      L'assistance est attribuÄe sous forme de chÅques hebdomadaires . . . mais les chÅques destinÄs au paiement des loyers sont envoyÄs directement aux propriÄtaires.
  193.  
  194.      Le service d'assistance aux chÖmeurs de la ville de MontrÄal dispose d'un personnel de 570 personnes et le co₧t de l'administration est d'environ $700 000 par an, ce qui reprÄsente ê peu prÅs 4² pour cent du co₧t total de l'aide aux chÖmeurs qui atteint quelque 15 millions de dollars par an.
  195.  
  196.      Vancouver: Vancouver fut l'une des premiÅres villes au Canada ê disposer d'un Service municipal d'assistance entiÅrement organisÄ. Il compte 113 employÄs.
  197.  
  198.      De 1932 ê 1935, les secours aux chÖmeurs furent accordÄs d'abord sous forme de certificats et, ê partir de septembre 1936, en argent. Seuls des travaux publics mineurs furent organisÄs pour les sans-travail.
  199.  
  200.      Un cÄlibataire qui reìoit de faìon irrÄguliÅre une rÄmunÄration a droit ê une exemption de $5 par mois et un homme mariÄ, $10 par mois . . .
  201.  
  202.      La responsabilitÄ des cÄlibataires chÖmeurs relÅve du gouvernement provincial. Les femmes cÄlibataires qui sont domiciliÄes dans la ville reìoivent un maximum de 44 cents par jour.
  203.  
  204.      Les bÄnÄficiaires de l'assistance aux chÖmeurs, hommes ou femmes, doivent possÄder une carte du Service de l'emploi prouvant qu'ils font rÄguliÅrement des demandes d'emploi. Ce rÅglement s'applique aussi ê tout garìon ou fille de plus de 18 ans inscrit comme personne ê charge.
  205.  
  206.      Hamilton: Les secours sont distribuÄs par un Conseil d'assistance publique formÄ de citadins et de membres du Conseil et nommÄs par ce dernier. Le personnel du Service est composÄ de 67 personnes.
  207.  
  208.      Des inspecteurs parcourent toute la ville tous les dix jours. Ce systÅme permet au service d'avoir une bonne description et une connaissance Ätendue de chaque famille qui reìoit de l'aide. Il fournit un inventaire dÄtaillÄ de tous les vÉtements possÄdÄs par chacun des membres des familles; il permet de connaötre de faìon suivie leur vie quotidienne, leur Ätat mental et physique et les conditions gÄnÄrales du milieu o¥ se trouvent leurs foyers. Ce systÅme permet de connaötre la rÄmunÄration obtenue par la famille, de vÄrifier directement la situation de l'emploi et d'exercer un effet prÄventif contre la destruction de la propriÄtÄ.
  209.  
  210.      Chaque inspecteur reìoit un nombre donnÄ de bons pour l'Äpicerie, la viande, le lait, le pain, le combustible, le loyer et les vÉtements. Il doit en payer la valeur nominale et, chaque semaine, en rendre compte.
  211.  
  212.      Ottawa: L'assistance est administrÄe par un Commissaire de l'Assistance publique qui relÅve du conseil municipal. Un personnel formÄ de 62 employÄs s'acquitte des tëches assignÄes au Service. Les secours sont accordÄs sous forme de certificats pour tous les articles de dÄpenses. Le budget de la ville ne prÄvoit aucune allocation pour des services autres que l'assistance, et lorsque de tels cas se prÄsentent, ils sont pris en main par les Services d'allocations aux mÅres nÄcessiteuses, les pensions de vieillesse et les organismes privÄs. Les familles ont droit comme rÄmunÄration ê un minimum de $5 par mois, jouissant d'une exemption par rapport au budget, et 65% du solde imputÄ au budget de l'assistance.
  213.  
  214.      Un asile des pauvres (Union Mission), financÄ par le secteur public et par le secteur privÄ, s'occupe des hommes sans logis ou de passage. Les femmes cÄlibataires reìoivent de l'aide du service d'assistance et d'autres services sont fournis au besoin par des agences du Homeless Women's Committee. Les familles de passage ont droit au transport jusqu'ê leur municipalitÄ d'origine.
  215.  
  216.      Edmonton: La politique suivie en matiÅre d'assistance est Ätablie et administrÄe par le Conseil municipal conseillÄ par un comitÄ spÄcialement constituÄ ê cette fin. L'administration du service est assurÄ par un gestionnaire, seize employÄs affectÄs ê la comptabilitÄ et au travail de bureau, quatre au service s'occupant des vÉtements, un cordonnier, onze enquÉteurs, un gardien et deux agents de police . . . Les secours sont accordÄs de la faìon suivante: 20% en argent, 80% en nature, sous forme de bons non restrictifs.
  217.  
  218.      Halifax: L'assistance est administrÄe par un comitÄ relevant du Conseil municipal. . . Le personnel comprend un administrateur, un adjoint ê l'administration, six enquÉteurs et six commis.
  219.  
  220.      Les secours sont attribuÄs sous forme de bons qui sont honorÄs par toutes les Äpiceries de la ville.
  221.  
  222.      Le prix du loyer est accordÄ au bÄnÄficiaire qui a reìu un avis d'expulsion et qui en appelle au Bureau de l'assistance. On lui demande alors de trouver au nouveau logement au plus bas prix possible et il reìoit une somme maximale de $10 pour payer le premier mois, aprÅs quoi c'est l'individu qui doit payer le loyer ê moins qu'il ne soit de nouveau expulsÄ.
  223.  
  224.      Avant d'Étre inscrit, le requÄrant reìoit la visite d'un inspecteur; ce dernier lui fait savoir qu'il doit jurer que tous les points de sa demande d'aide sont exacts. Il est ensuite interrogÄ minutieusement . . . les renseignements sont inscrits sur une formule d'inscription trÅs dÄtaillÄe.
  225.  
  226.      Lorsque le requÄrant est acceptÄ et inscrit sur la liste des bÄnÄficiaires de l'assistance, il reìoit une carte d'identitÄ qu'il signe et qu'il doit prÄsenter chaque fois qu'il vient chercher son allocation. Le reste du temps, le prestataire doit la garder chez lui, de sorte que, lorsque l'enquÉteur arrive, elle puisse lui Étre prÄsentÄe. Lorsque l'enquÉteur dÄcide de la prolongation des prestations, il appose sa signature et la date sur la carte et la remet au prestataire.
  227.  
  228.      Les secours ne sont accordÄs qu'une fois la carte prÄsentÄe par le prestataire au commis chargÄ de la distribution.
  229.  
  230.      Le montant et le type de l'assistance ont aussi variÄ de faìon considÄrable. Les suivantes proviennent d'un rapport sur les systÅmes d'assistance dans les grandes villes Ätabli par le prÄsident du ComitÄ de l'assistance et de l'emploi de Vancouver en 1934:
  231.  
  232.      MontrÄal est le seul endroit o¥ les allocations pour la nourriture varient selon les saisons. La prestation destinÄe ê la nourriture et aux vÉtements est augmentÄe de 10% pendant les mois d'hiver.
  233.  
  234.      Les provinces du Manitoba et de l'Alberta, ainsi que les villes d'Ottawa, de Toronto et de Winnipeg, suivent la mÉme ligne de conduite que Vancouver en accordant des allocations supplÄmentaires pour la nourriture sur prÄsentation d'un certificat mÄdical. ╦ MontrÄal, ê Calgary et ê Edmonton, aucune prestation spÄciale n'est accordÄe pour raison de santÄ.
  235.  
  236.      Tableau des rations alimentaires 
  237.                (quinzaine)
  238.  
  239.      2 adultes / 2 adultes: 3 enfants
  240.  
  241. Vancouver: $6.32 / $11.50; 
  242. Manitoba: 5.27 / 10.78 (hors de grandes 
  243.      villes);
  244. Alberta: 6.05 / 11.70 (hors de grandes 
  245.      villes);
  246. Ottawa: 6.20 / 10.50; 
  247. MontrÄal:*6.80 / 11.60; 
  248. Toronto: 5.12 / 10.88; 
  249. Winnipeg: 5.16 / 10.27; 
  250. Edmonton:**7.50 / 13.20; 
  251. Calgary: 9.00 / 15.30 
  252.  
  253. *Dans le cas de MontrÄal, l'allocation destinÄe ê la nourriture ne peut Étre distinguÄe, car la prestation s'applique ê l'alimentation et aux vÉtements. 
  254. **Edmonton accorde, pour l'alimentation des enfants, une prestation qui varie de 95ó par semaine pour les enfants de 12 ans et moins ê $1.05 pour ceux de plus de 12 ans.
  255.  
  256.      MÄthode de distribution: La mÄthode des bons pour la nourriture Ätait employÄe dans tous les endroits observÄs, ê l'exception de la ville de MontrÄal, qui accorde une prestation en espÅces pour l'alimentation et les vÉtements, mais la plupart des villes restreignent les biens qui peuvent Étre achetÄs ê une liste donnÄe d'articles d'Äpicerie; par contraste, Vancouver emploie un systÅme de bons non restrictifs.
  257.  
  258.      Logement: On s'aperìoit que dans la plupart des cas, les allocations de logement sont accordÄes de faìon plus ou moins rÄguliÅre, ê l'exception de la ville de Toronto qui paie seulement en cas d'urgence. ╦ Winnipeg, il arrive souvent que plusieurs familles doivent occuper la mÉme maison, mais un seul loyer est payÄ. ╦ Calgary, l'allocation de logement s'applique aussi ê l'Äclairage, au chauffage et ê l'approvisionnement en eau pour la pÄriode donnÄe. ╦ MontrÄal, c'est au propriÄtaire qu'il incombe de faire la preuve que sa propriÄtÄ est occupÄe par un bÄnÄficiaire de l'assistance et il doit lui-mÉme faire la demande.
  259.  
  260.      Combustible: Nous avons constatÄ que la distribution du combustible se fait sÄparÄment de celle des certificats pour l'alimentation mais qu'elle prÄsente des diffÄrences considÄrables selon les saisons. Le plus souvent, le barÅme d'ÄtÄ est comparable au systÅme de Vancouver. MontrÄal accorde de $2.40 ê $3.40 par mois durant l'ÄtÄ, tandis qu'Ottawa attribue seulement une demi-corde pour une pÄriode de six semaines et Winnipeg, un quart de corde par mois pendant l'ÄtÄ et une demi-corde par mois l'hiver.
  261.  
  262.      Travaux publics pour les sans-travail: ╦ Ottawa, les bÄnÄficiaires ne sont tenus de travailler qu'en retour des frais de logement ou de tenue de maison; MontrÄal n'exige aucun travail en Ächange de l'assistance accordÄe; ê Toronto, les bÄnÄficiaires ne sont nullement tenus de travailler en retour de l'assistance reìue, mais une certaine forme de travail, appelÄe ╟work test╚, a ÄtÄ instituÄe dans laquelle le chef de famille masculin peut Étre appelÄ pÄriodiquement ê travailler pendant une journÄe ╟comme preuve de sa sincÄritÄ╚; Winnipeg emploie continuellement au chantier deux hommes, choisis par roulement parmi ceux qui reìoivent de l'aide. Une somme de 38² cents de l'heure leur est allouÄe sur la caisse de secours et ils reìoivent 20 cents par jour comme allocation supplÄmentaire pour la nourriture; Edmonton demande aux bÄnÄficiaires une certaine somme de travail pour un salaire de 48 cents l'heure en retour d'une assistance; Calgary demande aux bÄnÄficiaires quarante heures de travail par mois, quel que soit le montant de l'aide qu'ils reìoivent. Le prix de ce travail est fixÄ ê 50 cents l'heure. Aucune somme d'argent n'est versÄe par le service et aucune allocation supplÄmentaire n'est accordÄe.
  263.  
  264.      VÉtements: ╦ Ottawa, c'est un organisme privÄ qui s'occupe de cette question et la ville paye les factures pour les vÉtements neufs; ê MontrÄal, l'allocation en espÅces versÄe pour l'alimentation comprend une somme pour les vÉtements; ê Vancouver, le Central Clothing Committee peut passer 26 commandes quotidiennes pour des vÉtements et le co₧t en est partagÄ avec les gouvernements supÄrieurs; Toronto utilise une mÄthode similaire; Edmonton possÅde un dÄpÖt central pour la distribution des vÉtements et les co₧ts en sont partagÄs avec les gouvernements supÄrieurs; ê Calgary, c'est la Croix-Rouge qui fournit les vÉtements aux chÖmeurs.
  265.  
  266.      Ces deux enquÉtes montrent la diversitÄ des mÄthodes de rÄpartition de l'assistance une fois que la crise de la dÄpression eut atteint un certain point d'Äquilibre. L'Ävolution de ces diffÄrents systÅmes ê partir de leur point de dÄpart au moment du Krach de 1929 est encore plus complexe et tout aussi diverse. De plus, les transformations qui suivirent -- ils touchÅrent gÄnÄralement les Services de sÄcuritÄ sociale -- prirent de nombreuses formes. L'organisation mise sur pied par les villes avait pour pendant des organisations semblables dans neuf provinces et au niveau fÄdÄral, toutes Ätant diffÄrentes dans leurs particularitÄs et, souvent, dans leur nature mÉme.  
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