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Text File  |  1994-11-28  |  5KB  |  89 lines

  1. La réalité de la guerre sous-marine
  2.  
  3. Une simulation défie un joueur en testant ses réactions et ses 
  4. aptitudes tactiques. Dans la plupart des jeux, l'objectif est de lutter 
  5. contre l'adversaire, où l'on exploite ce désir naturel propre aux 
  6. humains visant à devenir le meilleur.
  7.  
  8. De manière superficielle, on peut regarder la guerre sous le même 
  9. angle: un groupe doit combattre l'équipe adverse en agissant plus 
  10. adroitement. Nombreux sont les jeux d'ordinateurs et jeux de 
  11. société à utiliser des scenarii de guerre historiques ou imaginaires 
  12. pour captiver le joueur.
  13.  
  14. De cette façon, la guerre devient une procédure abstraite où l'on 
  15. doit prendre des décisions tactiques pour marquer des points. Le 
  16. gagnant devient alors un héros le temps de quelques heures, et la 
  17. réalité de la guerre s'efface.
  18.  
  19. Mais l'histoire du conflit sous-marin de la Seconde Guerre Mondiale 
  20. peut entraîner la glorification de la guerre et le culte des héros. Ce 
  21. processus a alors tendance à nous faire oublier la campagne de 
  22. destruction de la Wehrmacht à l'est, le bombardement des civils, 
  23. l'extermination des Juifs en Europe, et le fait que les équipages 
  24. sous-mariniers dépendaient de la volonté d'un groupe criminel à la 
  25. tête du Reich allemand.
  26.  
  27. Tout au début de la guerre, la machine de propagande de 
  28. Goebbels créa cette image du héros à travers les commandants de 
  29. sous-marins allemands. Le meilleur exemple était le 
  30. Kapitänleutnant Günther Prien, quand il entra avec le U-47 dans la 
  31. base de la flotte britannique à Scapa Flow pour torpiller le navire 
  32. de guerre "Royal Oak".
  33.  
  34. La célébration des victoires dissimula rapidement le fait que la 
  35. force sous-marine n'était qu'un rouage de la machine de guerre 
  36. d'Hitler. La propagande affirmait que la multiplication des victoires 
  37. était possible, et elle les utilisait à outrance. Goebbels et son 
  38. gouvernement comprirent rapidement que la guerre sous-marine 
  39. pouvait être exploitée plus aisément que les combats des autres 
  40. branches de l'armée. En effet, les résultats étaient plus difficiles à 
  41. vérifier, et par conséquent facilitaient la création de mensonges et 
  42. d'altérations. On attesta donc de victoires jusqu'à la fin.
  43.  
  44. L'illusion de la guerre sous-marine visant à faire croire qu'elle 
  45. consiste en un combat entre "deux hommes" se dissipe rapidement 
  46. si on se penche sur les faits historiques. Peu de temps après la 
  47. déclaration de guerre par l'Angleterre, le U-30 torpilla l'Athenia, 
  48. paquebot de ligne anglais. Cent douze personnes périrent, la 
  49. plupart des femmes et des enfants. L'Allemagne viola la loi 
  50. internationale dès le premier jour de la guerre, et par conséquent, 
  51. les forces sous-marines allemandes furent mal considérées car 
  52. l'usage principal d'un sous-marin était d'éliminer des victimes sans 
  53. recours. Les navires de commerce représentaient leur cible 
  54. principale, et derrière le terme "tonnage de guerre" se cachait un 
  55. chiffre impressionant de marins disparus.
  56.  
  57. Les sous-mariniers vivaient comme des taupes dans des mines 
  58. souterraines. Les réserves étaient inexistantes, tout comme les 
  59. couchettes et les logements de l'équipage. Les hommes vivaient 
  60. souvent pendant une centaine de jours à bord de ces étroites 
  61. boîtes de conserve sans pouvoir se déplacer ou respirer de l'air 
  62. frais. Il n'y avait pas d'hygiène, et les troubles psychologiques 
  63. étaient fréquents surtout quand on ne parvenait pas à rencontrer 
  64. l'ennemi. En effet, ce dernier était invisible et il représentait une 
  65. cible abstraite. Ce conflit fit de nombreuses victimes, et la guerre 
  66. sous-marine n'était qu'un préambule à notre époque capable de 
  67. générer une destruction en masse. Elle représenta sans aucun 
  68. doute un des aspects les plus durs de la Seconde Guerre Mondiale. 
  69. Lothar-Günther Bucheim, auteur qui participa à la guerre à bord 
  70. des sous-marins, raconte une de ses expériences: "Nous ne 
  71. cessions de trouver des survivants à bord de canots de sauvetage 
  72. sur un océan infini. Les équipages sous-mariniers faisaient de leur 
  73. mieux pour fournir des provisions, des cartes ou des compas, mais 
  74. ils ne pouvaient secourir les victimes de leurs torpillages. Dès 
  75. septembre 1942, il leur fut interdit de porter secours aux marins 
  76. naufragés (...) Tout en pensant constamment à leur propre fin, les 
  77. sous-mariniers devaient abandonner ces hommes sans ressource à 
  78. une mort certaine, à bord de canots de sauvetage parfois en très 
  79. mauvais état. (...) A la crainte d'être délaissés s'ajoutait la peur du 
  80. pétrole, qui une fois infiltré dans les poumons causait une fin 
  81. immédiate. Ils craignaient également le froid paralysant les 
  82. membres, et l'absence d'eau fraîche.
  83.  
  84. Quand le combat meurtrier à travers les sept océans s'acheva, plus 
  85. de la majorité des équipages avait péri. Presque 39 000 sous-
  86. mariniers furent envoyés en mer: parmi eux 27 082 n'en revinrent 
  87. jamais. 
  88.  
  89.