home *** CD-ROM | disk | FTP | other *** search
- La réalité de la guerre sous-marine
-
- Une simulation défie un joueur en testant ses réactions et ses
- aptitudes tactiques. Dans la plupart des jeux, l'objectif est de lutter
- contre l'adversaire, où l'on exploite ce désir naturel propre aux
- humains visant à devenir le meilleur.
-
- De manière superficielle, on peut regarder la guerre sous le même
- angle: un groupe doit combattre l'équipe adverse en agissant plus
- adroitement. Nombreux sont les jeux d'ordinateurs et jeux de
- société à utiliser des scenarii de guerre historiques ou imaginaires
- pour captiver le joueur.
-
- De cette façon, la guerre devient une procédure abstraite où l'on
- doit prendre des décisions tactiques pour marquer des points. Le
- gagnant devient alors un héros le temps de quelques heures, et la
- réalité de la guerre s'efface.
-
- Mais l'histoire du conflit sous-marin de la Seconde Guerre Mondiale
- peut entraîner la glorification de la guerre et le culte des héros. Ce
- processus a alors tendance à nous faire oublier la campagne de
- destruction de la Wehrmacht à l'est, le bombardement des civils,
- l'extermination des Juifs en Europe, et le fait que les équipages
- sous-mariniers dépendaient de la volonté d'un groupe criminel à la
- tête du Reich allemand.
-
- Tout au début de la guerre, la machine de propagande de
- Goebbels créa cette image du héros à travers les commandants de
- sous-marins allemands. Le meilleur exemple était le
- Kapitänleutnant Günther Prien, quand il entra avec le U-47 dans la
- base de la flotte britannique à Scapa Flow pour torpiller le navire
- de guerre "Royal Oak".
-
- La célébration des victoires dissimula rapidement le fait que la
- force sous-marine n'était qu'un rouage de la machine de guerre
- d'Hitler. La propagande affirmait que la multiplication des victoires
- était possible, et elle les utilisait à outrance. Goebbels et son
- gouvernement comprirent rapidement que la guerre sous-marine
- pouvait être exploitée plus aisément que les combats des autres
- branches de l'armée. En effet, les résultats étaient plus difficiles à
- vérifier, et par conséquent facilitaient la création de mensonges et
- d'altérations. On attesta donc de victoires jusqu'à la fin.
-
- L'illusion de la guerre sous-marine visant à faire croire qu'elle
- consiste en un combat entre "deux hommes" se dissipe rapidement
- si on se penche sur les faits historiques. Peu de temps après la
- déclaration de guerre par l'Angleterre, le U-30 torpilla l'Athenia,
- paquebot de ligne anglais. Cent douze personnes périrent, la
- plupart des femmes et des enfants. L'Allemagne viola la loi
- internationale dès le premier jour de la guerre, et par conséquent,
- les forces sous-marines allemandes furent mal considérées car
- l'usage principal d'un sous-marin était d'éliminer des victimes sans
- recours. Les navires de commerce représentaient leur cible
- principale, et derrière le terme "tonnage de guerre" se cachait un
- chiffre impressionant de marins disparus.
-
- Les sous-mariniers vivaient comme des taupes dans des mines
- souterraines. Les réserves étaient inexistantes, tout comme les
- couchettes et les logements de l'équipage. Les hommes vivaient
- souvent pendant une centaine de jours à bord de ces étroites
- boîtes de conserve sans pouvoir se déplacer ou respirer de l'air
- frais. Il n'y avait pas d'hygiène, et les troubles psychologiques
- étaient fréquents surtout quand on ne parvenait pas à rencontrer
- l'ennemi. En effet, ce dernier était invisible et il représentait une
- cible abstraite. Ce conflit fit de nombreuses victimes, et la guerre
- sous-marine n'était qu'un préambule à notre époque capable de
- générer une destruction en masse. Elle représenta sans aucun
- doute un des aspects les plus durs de la Seconde Guerre Mondiale.
- Lothar-Günther Bucheim, auteur qui participa à la guerre à bord
- des sous-marins, raconte une de ses expériences: "Nous ne
- cessions de trouver des survivants à bord de canots de sauvetage
- sur un océan infini. Les équipages sous-mariniers faisaient de leur
- mieux pour fournir des provisions, des cartes ou des compas, mais
- ils ne pouvaient secourir les victimes de leurs torpillages. Dès
- septembre 1942, il leur fut interdit de porter secours aux marins
- naufragés (...) Tout en pensant constamment à leur propre fin, les
- sous-mariniers devaient abandonner ces hommes sans ressource à
- une mort certaine, à bord de canots de sauvetage parfois en très
- mauvais état. (...) A la crainte d'être délaissés s'ajoutait la peur du
- pétrole, qui une fois infiltré dans les poumons causait une fin
- immédiate. Ils craignaient également le froid paralysant les
- membres, et l'absence d'eau fraîche.
-
- Quand le combat meurtrier à travers les sept océans s'acheva, plus
- de la majorité des équipages avait péri. Presque 39 000 sous-
- mariniers furent envoyés en mer: parmi eux 27 082 n'en revinrent
- jamais.
-
-