Concepts et terminologie

Comme le champ de l'éducation et de la formation des adultes est à la fois un domaine fluctuant et récent, il s'ensuit que sa conceptualisation est loin d'être achevée. Le glossaire qui suit permettra de prendre conscience de la diversité d'une terminologie qui emprunte à la formation initiale et à l'éducation, mais qui comporte également plusieurs termes spécifiques au domaine. S'il est impossible de clarifier l'ensemble de la situation, nous ferons état de quelques constats généraux.

Les différences culturelles
Un des phénomènes qui rend difficile la compréhension du champ de l'éducation des adultes est la différence de conceptions et d'usages terminologiques entre les sociétés et entre les grandes communautés linguistiques.

Par exemple, alors que le monde francophone utilise couramment le syntagme ½Éducation des adultes╗, le milieu anglo-saxon opte plutôt pour l'expression ½Adult learning╗. Ainsi, la Déclaration de la cinquième Conférence internationale sur l'éducation des adultes (CONFINTEA) tenue à Hambourg, en 1997, s'intitule en français Déclaration sur l'éducation des adultes et en anglais, Declaration on Adult Learning, ce qui n'est pas équivalent.

Et l'on ne peut substituer ½apprentissage adulte╗ à ½adult learning╗ parce que l'expression est peu usitée en français mais aussi parce que, en France tout particulièrement, le terme ½apprentissage╗ renvoie souvent, lorsqu'il s'agit d'adultes, à la formation reçue par un ½apprenti╗ en entreprise. (D'ailleurs, le Québec dispose d'un ½régime d'apprentissage╗.)

De plus, dans le monde anglo-saxon, l'usage de l'expression ½adult learning╗ n'est pas fortuit. L'expression ½Adult education╗ existait et elle subsiste. Le recours à ½adult learning╗ traduit une volonté de mettre davantage l'accent sur l'adulte qui apprend que sur le système de l'éducation des adultes.
L'éducation des adultes ou la formation continue?
Par ailleurs, au sein même de la communauté francophone, des désaccords se manifestent quant à certains choix terminologiques. Nous en donnerons deux exemples. Dans les années 60, le concept d'½éducation permanente╗ est apparu pour traduire la notion d'un apprentissage tout au long de la vie, allant de la naissance jusqu'au troisième âge. Pourtant, au Québec et dans d'autres sociétés francophones comme la Belgique, on a choisi d'utiliser Éducation permanente pour renommer l'éducation des adultes! C'est par exemple le choix intentionnel qu'a fait la Commission Parent sur l'enseignement dans son rapport de 1964 :

L'éducation permanente

Nous préférons l'appellation ½éducation permanente╗ à l'appellation ½éducation des adultes╗, parce que nous croyons que, en fait, ce que nous proposons est vraiment nouveau. Éducation des adultes signifie dans l'esprit des gens : réponse, de temps en temps, à certains besoins et certains goûts particuliers. Nous entendons par l'éducation permanente un besoin et un goût plus général de perfectionnement et de culture ; nous la concevons comme un service général de l'enseignement qui, non seulement offre à la population adulte toute la variété nécessaire de cours et d'occasions de perfectionnement et de culture, mais aussi incite cette population à en profiter et vise à généraliser la préoccupation et l'habitude de l'étude chez les adultes. C'est là une réalité nouvelle correspondant à des temps nouveaux, à une époque caractérisée par l'explosion de la connaissance, par la mobilité professionnelle, par l'importance du loisir, par l'évolution de la vie démocratique, économique et sociale. (º 467)
En fait, le service de l'éducation des adultes du MEQ, créé en 1966, sera confié à la ½Direction générale de l'éducation permanente╗. Il faudra quelques années avant que le MEQ se rende à l'évidence et renomme ½éducation des adultes╗ la direction concernée. (De façon analogue, l'Université de Montréal créera une Faculté de l'éducation permanente (FEP) dont le mandat est essentiellement l'éducation des adultes).
Plus près de nous, la proposition de politique d'éducation des adultes a été intitulée ½Vers une politique de formation continue╗ par le MEQ (1998). Quelques intervenants, dont l'Institut canadien d'éducation des adultes (ICÉA), ont critiqué l'usage de cette appellation en opinant que la formation continue s'appliquait principalement au domaine de la formation professionnelle et qu'elle évacuait l'alphabétisation et la formation de base des adultes. Cherchant à concilier les deux conceptions dans son rapport au ministre de l'Éducation (1999), Paul Inchauspé proposera le titre suivant : Politique de formation des adultes dans une perspective de formation continue.

Ce choix a été retenu par le gouvernement.

L'opposition entre ½éducation des adultes╗ et ½formation continue╗ comprend également la distinction entre ½éducation╗ et ½formation╗. Ici encore, la terminologie est incertaine et les deux termes, éminemment polysémiques, peuvent donner lieu à diverses interprétations contradictoires, selon les sources qui les utilisent. Par exemple, certains estiment que le terme ½éducation╗ est fondamental alors que le terme ½formation╗ serait davantage ½instrumental╗. On évoque pourtant, en français, la ½formation fondamentale╗ ou la ½formation générale>╗. De plus, d'aucuns avancent que la ½formation╗ (training) correspond principalement à la ½formation professionnelle╗.

Une des solutions qui tend à se développer est d'utiliser l'expression ½éducation et formation des adultes╗ (ÉFA) pour englober les dimensions fondamentales et instrumentales ou fonctionnelles du champ. C'est, par exemple, l'expression retenue par le Séminaire international sur les politiques d'éducation et de formation des adultes dans les pays industrialisés (Québec, décembre 1999).


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