Les années 1990-2000 et la nouvelle réforme de l'éducation

En cette fin de siècle et de millénaire, les sociétés sont remises en question, la structure politique et sociale construite après la Deuxième Guerre mondiale ne tient plus. Les pouvoirs politiques, héritiers de l'effondrement des systèmes de l'après-guerre se sont placés au service d'une nouvelle logique, celle du déploiement du capital qui obéit à des mots comme libre-échange, privatisation, déréglementation, monétarisme, productivité, compétitivité. Un nouvel ordre mondial est apparu, les francophones parlent à ce sujet de mondialisation pendant que les anglophones préfèrent le terme de globalisation. Il s'agit pourtant du même phénomène, caractérisé par une situation d'étroite interdépendance économique entre les différentes régions de la planète. Dans cette nouvelle logique, les finances, le commerce, les médias sont les domaines qui, aidés par les nouvelles technologies de l'information et de la communication, ont connu un développement étonnant, donnant naissance à de vrais empires qui contrôlent l'espace économique mondial et vers lesquels tendent tous les secteurs d'activités.

Dans ce contexte, rien n'est gagné en ce qui concerne la démocratie et l'accessibilité pour tous à l'école. En effet, ces changements de la sphère économique et la naissance de ce nouveau capitalisme financier ont des répercussions certaines sur l'ensemble des sociétés. L'État-providence qui assumait le rôle de redistributeur et même de médiateur entre le capital et le travail a été détruit par les effets de la mondialisation. À cet affaiblissement des États-nations s'ajoute le danger que les fondements sur lesquels se sont bâties nos démocraties traditionnelles disparaissent. L'appartenance territoriale, la langue, la culture, les valeurs sociales courent le risque de se dissoudre face à la mondialisation des échanges et au capitalisme sauvage et sans contrôle démocratique.

Par ailleurs, cette mondialisation accentue le clivage entre les riches et les pauvres: non seulement les riches sont des plus en plus riches mais ils sont de moins en moins nombreux, car la mondialisation exige de chaque pays qu'il s'invente des atouts spécifiques pour participer à la concurrence économique mondiale, ce qui rend encore plus grande la séparation entre les gagnants et les perdants du développement.

Dans ce contexte caractérisé par le pouvoir économique et médiatique ainsi que par l'uniformisation de la culture, l'éducation est appelée à remplir une fonction productiviste dans la société. Elle doit assurer la formation de la main-d'oeuvre, le développement des compétences et des qualifications afin que la société soit capable de suivre le rythme des innovations technologiques. Les connaissances deviennent déterminantes: il faut posséder, maîtriser et développer le savoir mais pas n'importe quel savoir, celui qui répond aux besoins de l'entreprise, aux lois du marché, à la compétitivité internationale.

On doit ajouter la mission de socialisation, car l'école doit favoriser le sentiment d'appartenance à la collectivité, mais aussi la capacité de ½vivre ensemble╗ en faisant de la diversité des sociétés un facteur de compréhension mutuelle. Autrement dit, l'école doit être un agent de cohésion sociale.

L'école de la société québécoise, celle qui faisait consensus après la réforme Parent, ne peut plus répondre à ces nouvelles demandes. Les constats sont préoccupants: presque un million de personnes sont analphabètes, le décrochage scolaire s'accentue, le taux de diplômation chute et environ 35% de la population est sous-scolarisée. À ces éléments il faut ajouter le fait que les pratiques sélectives s'accentuent créant ainsi plus d'exclusion et de discrimination sociale. Cela amène de grands changements dans le monde de l'éducation. En témoigne, au Québec, la tenue, en 1995-96, des États généraux sur l'éducation interpellant toutes les instances et tous les agents éducatifs, de même que tous les ordres d'enseignement. (Voir Module 2, Les États généraux et les principales retombées (1988-1997) et le site du ministère de l'Éducation)

La Commission des États généraux a mis à jour certains éléments lacunaires ou problématiques du système éducatif québécois, entre autres, en ce qui a trait à la définition du champ d'action de l'école et aux contenus du curriculum de l'école primaire et secondaire. Les changements apportés au curriculum ont bien circonscrit le rôle que l'école doit jouer dans la société. Le rapport final des États généraux reconnaît à l'école la responsabilité de préparer à l'exercice de la citoyenneté. Il est précisé qu'il importe que les élèves acquièrent et développent les connaissances, les habiletés et les attitudes nécessaires à ½la maîtrise de leur environnement de même qu'à leur insertion dans un monde en changement en tant qu'êtres créatifs et citoyens responsables╗, [Commission des États généraux sur l'éducation, p. 19] .

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