Boule de Cristal 1

08 - La Robe de Sagesse

Par TUESDAY LOBSANG RAMPA
Paris : Éd. J'ai Lu, 1972, ©1971,1985, 1990, 248 P. {N° 1922}, ©1966*
{La Robe de Sagesse, par RAMPA:  (pages 99 à 103)(Extrait 04)} Boule de Cristal 1.

    « Voilà qui est intéressant », pensai-je. Devant moi, 9 lamas en robe safran étaient assis en rond, autour d'un socle ouvragé sur lequel reposait une Chose, que je distinguais mal. Il semblait y avoir quelque chose, et pourtant il paraissait n'y avoir rien. Je frissonnai, et les chevaux rasés se dressèrent sur ma tête comme des gardes à la parade, car les doigts glacés de la peur m'étreignaient au point que je faillis prendre mes jambes à mon coup. J'avais l'impression que, sur ce socle sculpté, se tenait une créature d'un autre monde, une créature qui n'avait pas d'existence dans le nôtre et peut-être aucun dans ce monde des ombres d'où elle était venue. J'ouvris de grands yeux.

    Cela ressemblait vaguement à un globe, mais sans forme et pourtant cette forme bougeait! J'aurais voulu m'approcher, regarder par-dessus l'épaule d'un des lamas, mais je risquais d'être alors surpris. Je restai donc à l'ombre de la statue, je me frottai les yeux pour en chasser le sommeil, pour tenter de mieux voir, et finalement je m'avançai à quatre pattes, sur les mains et les genoux, en glissant de côté pour voir entre les épaules de deux des lamas.

    Je m'aperçus alors que la « chose » posée sur le socle était un énorme bloc de cristal de roche, parfait, sans le moindre défaut. Les Lamas l'entouraient comme s'ils l'adoraient. Ils le regardaient intensément, et pourtant pas assez intensément qu'ils dussent lui consacrer leurs yeux physiques, mais seulement, semblait-il, leur troisième £il. « Ma foi, me dis-je, moi aussi je suis clairvoyant. » Je cessai donc de regarder avec les yeux et laissai mes facultés de clairvoyance les remplacer; je vis alors dans le cristal des couleurs, un tourbillon de couleur et de fumée. Ahuri, effrayé, je me sentis tomber, tomber d'une hauteur immense, tomber du toit du monde dans le plus profond des abîmes. Non, ce n'était pas un abîme mais un paysage, un autre monde qui s'étendait sous mes yeux, où les couleurs étaient différentes, où tout était différent. Je le contemplais du haut d'une légère éminence et je voyais des gens errer, pleins de tristesse, douloureux. C'était des âmes perdues, des âmes sans guides, des âmes cherchant à se délivrer de leurs soucis.

    Alors que j'étais assis là, comme si je me trouvais sur un autre plan, dans un autre monde ensoleillé, les lamas continuaient de psalmodier. De temps en temps, l'un d'eux levait une main et agitait une clochette d'argent et, en face de lui, un autre faisait le même geste mais sa clochette avait un autre son. Ainsi la litanie se poursuivit, montant et descendant l'octave, en glissade, pas du tout en notes séparées comme dans les autres parties du monde, mais se confondant en accords que les murs renvoyaient et qui se répercutaient en de nouveaux accords.

    Le chef de ce groupe de lamas frappa dans ses mains, son voisin agita une clochette et un troisième éleva la voix pour une prière rituelle, « Ah, entendez la voix de nos âmes ». Ils chantèrent ensuite tous les très anciens couplets du cantique, chacun à son tour, d'abord, puis à l'unisson, et la cadence de leurs voix montait et descendait, m'emportant hors du temps, me soulevant hors de moi-même.

    Enfin les voix se turent. Un lama fit tinter très légèrement sa clochette, et tous les autres l'imitèrent, sur des rythmes et des sons différents formant un ensemble tonal varié, que les murs répercutèrent. Les Lamas reprirent le cantique, mais tout bas, en agitant leurs clochettes. L'effet était hypnotique, mystique.

    Je regardai les gens qui m'entouraient, mais étaient-ils là près de moi ? Étais-je dans un autre monde ? Ou bien les voyais-je dans le cristal ? Je ne savais plus. Pourtant, j'avais l'impression très forte d'être ailleurs, dans un univers où l'herbe était plus verte, le ciel plus bleu, l'ombre et la lumière plus violemment contrastées. Il y avait de l'herbe verte sous mes pieds, je la sentais ! Je pouvais y plonger mes orteils ! Je sentais l'humidité du sol imprégner mes genoux, ma robe. Mes mains aussi étaient humides et je sentais sous mes paumes les brins d'herbe et quelques cailloux. Je regardai autour de moi avec curiosité. Au premier plan, je vis d'énormes rochers de pierre verdâtre marbrée de blanc. Plus loin j'en aperçus d'autres, de diverses couleurs; celui qui m'attirait le plus était rougeâtre, strié de veinules blanches. Mais ce qui m'impressionnait le plus, c'était la réalité de cette vision; toutes ces choses paraissaient plus normales que la normale, les couleurs plus vives, les contours plus nets.

    Une légère brise soufflait; je la sentais caresser ma joue gauche. C'était assez stupéfiant car elle m'apportait d'étranges senteurs inconnues, exotiques. À une certaine distance j'aperçus un insecte semblable à une abeille, qui bourdonnait et voletait; il se posa sur une petite fleur éclose dans l'herbe et pénétra sa corolle en trompette. Je voyais tout cela sans avoir conscience du passage du temps mais soudain j'eus peur car un groupe de personnes marchait vers moi. Je les regardai, paralysé; ces gens venaient vers moi et j'étais sur leur chemin. Certains étaient très vieux, et s'appuyaient lourdement sur des bâtons; ceux-là marchaient pieds nus, vêtus de loques. D'autres paraissaient riches, mais sans cet air prospère, qui accompagne la richesse car ce qui frappait avant tout, chez ces hommes et ces femmes, c'était leur terreur, leur angoisse; à tout moment ils sursautaient, portaient une main à leur c£ur, regardaient peureusement autour d'eux et aucun d'eux ne semblait avoir conscience de son voisin; ils semblaient se croire seuls, oubliés, désolés, abandonnés dans une terre étrangère. Ils avançaient ainsi en groupe mains chacun dans sa solitude, ettirés par les voix que j'entendais aussi : « Ah! Écoutez les Voix de nos âmes, vous tous qui errez sans guide. » Le chant psalmodié continuait, ces gens avançaient, et d'autres arrivèrent et quand ils atteignirent un certain endroit - je ne pouvais voir vraiment ce qui se passait - leur visage s'illumina d'une espèce de joie supra-terrestre, chacun se redressa comme s'il venait de recevoir la promesse d'un réconfort. Ils disparurent à ma vue, en marchant.

    Soudain, des cloches sonnèrent, dissonantes, et je me sentis violemment tiré, comme si on me ramenait, comme si j'étais un cerf-volant au bout d'une ficelle que l'on ramenait en luttant contre une bourrasque qui cherchait à l'emporter.

    Je contemplai l'étrange panorama et j'eus l'impression que la nuit tombait car le ciel devenait plus sombre et les couleurs perdaient leur vivacité. Les objets semblaient rétrécir. Rétrécir? Comment était-ce possible? Pourtant c'était indiscutable, tout rapetissait, et non seulement ils diminuaient mais un brouillard semblable aux nuages célestes commençait à recouvrir la face de ce monde; sous mes yeux horrifiés, tandis que tout devenait de plus en plus petit, le brouillard se changea en nuées d'orage, et le tonnerre gronda accompagné d'éclairs.

    Je m'élevais dans les airs, je montais de plus en plus haut à mesure que le monde devenait plus petit. En regardant la terre je la vis tourner sous mes pieds, et je me raisonnai, je me dis qu'elle ne pouvait pas tourner là-bas sous mes pieds puisque j'étais à quatre pattes dans le temple. Mais y étais-je? Étourdi, égaré, je ne savais que penser lorsque je ressentis encore une fois cette secousse violente, effrayante...

    Pris de vertige, je levai la main pour me frotter les yeux. Et quand je les rouvris, je vis que le cristal n'était plus que du cristal de roche, ce n'était plus un monde étrange mais une roche sans vie et sans lumière.

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