Les organismes de gestion de la politique linguistique
Il faut donc revenir un peu en arrière, au moment où les lois 63, 22 et 101 sont adoptées, pour voir de plus près comment la politique linguistique a pu être appliquée de façon concrète dans la société québécoise. Trois organismes spécifiques ont essentiellement administré les lois. La définition de leurs pouvoirs respectifs se trouve à l'intérieur de la Charte de la langue française.
Au départ, l'Office de la langue française existait depuis 1961. Il était chargé d'améliorer la qualité de la langue au Québec. La loi 63 lui avait également confié le mandat d'enquêter et de faire des recommandations. La loi 22 le transforme en Régie de la langue française avec la responsabilité de veiller à l'application de la loi.
Avec sa Charte de la langue française, la loi 101 établit finalement trois organismes : un Office, en charge de la francisation, un Conseil, qui évalue la situation linguistique et une Commission de surveillance qui s'occupe des contrevenants à la loi - la loi 86 abolit ce dernier organisme en 1993. La Charte de la langue française prévoit également la création d'une Commission d'appel sur la langue d'enseignement.
Le 12 juin 2002, la Loi 104 modifie la Charte de la langue française. Par cette loi, l'office de la langue française devient l'Office québécois de la langue française.
L'Office québécois de la langue française
Cet organisme est institué pour définir et conduire la politique québécoise en matière de recherche linguistique et de terminologie et de veiller à ce que le français devienne, le plus tôt possible, la langue des communications, du travail, du commerce et des affaires dans l'administration et les entreprises (...) (article 100). L'Office est composé de cinq membres, dont un président, nommés par le gouvernement pour au plus cinq ans (article 101).
Depuis juin 2002, l'Office québécois de la langue française a pour mission :
de définir et de conduire la politique québécoise en matière d'officialisation linguistique, de terminologie ainsi que de francisation de l'Administration et des entreprises;
de veiller à ce que le français soit la langue habituelle et normale du travail, des communications, du commerce et des affaires dans l'Administration et les entreprises;
d'aider à définir et à élaborer les programmes de francisation prévus par la loi et en suivre l'application;
de surveiller l'évolution de la situation linguistique au Québec et d'en faire rapport tous les cinq ans au ministre;
d'assurer le respect de la Charte de la langue française, agissant d'office ou à la suite de la réception de plaintes;
d'établir les programmes de recherche nécessaires à l'application de la loi et d'effectuer ou de faire effectuer les études prévues par ces programmes.
Parmi ses pouvoirs, l'Office peut :
prendre les mesures appropriées pour assurer la promotion du français;
assister et informer l'Administration, les entreprises, les individus et les groupes en ce qui concerne la correction et l'enrichissement de la langue française;
recevoir leurs observations et leurs suggestions sur la qualité de la langue ainsi que sur les difficultés d'application de la présente loi, et en faire rapport au ministre.
La Charte de la langue française institue aussi deux autres organismes : la Commission de toponymie et le Conseil supérieur de la langue française.
L'Office québécois de la langue française est composé de huit membres dont un président-directeur général nommé par le gouvernement pour au plus cinq ans.
Deux comités sont institués par la Charte au sein de l'Office, le Comité d'officialisation linguistique et le Comité de suivi de la situation linguistique, chacun de ces comités se composant de cinq membres nommés par l'Office.
Le Conseil supérieur de la langue française
Le Conseil a pour mission de conseiller le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française sur toute question relative à la langue française au Québec.
À ce titre, le Conseil1
donne son avis au ministre sur toute question que celui-ci lui soumet;
saisit le ministre de toute question qui, selon lui, appelle l'attention du gouvernement.
Pour l'accomplissement de sa mission, le Conseil peut2 :
recevoir et entendre les observations de personnes ou de groupes;
effectuer ou faire effectuer les études et recherches qu'il juge nécessaires.
En outre, il peut informer le public sur toute question relative à la langue française au Québec.
La Commission d'appel sur la langue d'enseignement
½La Commission d'appel sur la langue d'enseignement╗ est un organisme quasi judiciaire créé en vertu des dispositions de la Charte de la langue française. Elle a pour mandat d'entendre l'appel relativement :
aux décisions des organismes scolaires chargés d'appliquer les dispositions de la loi relativement à l'admissibilité à l'enseignement en anglais ;
aux décisions du ministre de l'Éducation qui a le pouvoir d'annuler une déclaration d'admissibilité. [Després-Poirier].
Le mandat de la Commission sera élargi en 1988 afin de rendre l'enseignement en anglais accessible à un enfant qui, en raison de cet empêchement vivrait une situation, d'ordre familial ou humanitaire, jugée trop difficile. Le ministre peut alors déclarer cet enfant admissible. Les cas de ce type doivent toutefois être répertoriés annuellement et explicités.
En résumé, de 1969 à 1977, les gouvernements successifs ont adopté des lois pour protéger et promouvoir le français au Québec. Par la suite et jusqu'à aujourd'hui, les interventions du gouvernement québécois ont toutes été faites pour réagir à des jugements juridiques visant à amenuiser les dispositions de la loi 101.