Les paramètres de lÆexercice de la profession enseignante au Québec

Développement professionnel: phases, étapes et processus

Il ne s'agit pas ici de faire état des conceptions du développement professionnel de l'enseignant, mais plutôt de faire état des phases ou des étapes, les unes s'imbriquant dans les autres, au travers desquelles un enseignant est susceptible de passer tout au long de sa carrière. Le danger est présent de confondre des trajectoires d'un groupe d'enseignants analysées sous l'angle d'une théorie explicative et un processus structuré en termes de règles et de passages obligés à l'intérieur d'un système d'éducation hiérarchisé. Nous nous limiterons à ces principales étapes par lesquelles un futur enseignant est susceptible de passer, en faisant appel au besoin à des références et à des concepts ½éclairants╗.

Il y a un minimum de trois grandes étapes (depuis la réforme de la formation des maîtres qui a conduit à de nouveaux programmes de formation initiale à l'enseignement en 1994 et en 1995) qu'un enseignant va franchir tout au long d'une carrière dans l'enseignement:

Ce qui distingue particulièrement ces étapes les unes des autres, c'est leur caractère plus ou moins singulier. En effet, le trajet de la formation initiale est celui qui présente l'aspect le plus commun aux futurs enseignants, en ce sens qu'il est le même pour tous, sachant bien sûr que tous ne le vivent pas de la même façon.

L'insertion professionnelle est beaucoup caractérisée, au Québec du moins, depuis le début des années 1980, par la précarité de l'emploi, un processus d'embauche long et irrégulier, des expériences de pratique de classe pour lesquelles l'enseignant est peu ou pas qualifié ou préparé. De plus, jusqu'en 1998, (encore pour quelques années pour les diplômés d'avant et les détenteurs de permis d'enseignement), cette étape comprenait une période de probation (définie au point 2.1) d'un maximum de cinq ans, à l'intérieur de laquelle il fallait enseigner l'équivalent de deux années complètes et obtenir une recommandation au brevet d'enseignement du comité de probation. L'insertion professionnelle était donc largement teintée d'anxiété et d'incertitude, non seulement quant à l'obtention d'un contrat, mais en plus, sur l'évaluation des prestations d'enseignement pour l'obtention du brevet.

À travers ces étapes, la personne de l'enseignant traverse aussi des phases de développement, avec plus ou moins des états de ½crise╗ ou de remise en question de son choix professionnel. La construction de son identité professionnelle débute le plus souvent avec ses premiers contacts ou stages dans une école et se poursuit avec les premiers contrats et la prise en charge réelle d'une classe pour plus d'une année. La socialisation faite dans le milieu de sa profession débute avec les stages, qui offrent une prise en charge assez soutenue (de quelques semaines à quelques mois selon les programmes) d'une classe: ce qui permet de fréquenter l'équipe-école et d'apprivoiser les cultures d'établissement. Elle s'intensifie, bien sûr, avec l'insertion sur une base régulière dans une école, soit comme remplaçant reconnu ou comme enseignant de plein titre. Pour une compréhension plus approfondie de cette problématique, se référer à l'avis du COFPE ½Offrir la profession en héritage╗, mars 2003. DÆailleurs, suite à cet avis, un colloque national a eu lieu à Laval en mai 2004. Les organismes qui lÆont préparé, avec lÆappui financier du MELS, ont développé un site interactif (Carrefour national de lÆinsertion professionnelle en enseignement, CNIPE) sur lÆinsertion professionnelle pour tous les nouveaux enseignants débutant dans la profession.

Enfin, la formation continue chevauche, dans la plupart des cas, l'apprentissage des débuts dans la profession, c'est-à-dire les compléments de la formation initiale que forment la vie de la classe, la vie de l'école, l'établissement d'une gestion de classe et l'évaluation des apprentissages. Le ½terrain╗ de la pratique offre d'entrée de jeu des ½ferments╗ importants de formation continue.

Lorsque l'enseignant a le sentiment de maîtriser des contenus d'apprentissage et une bonne gestion de classe, d'être intégré et de se sentir reconnu dans l'équipe-école et valorisé par ses élèves, il devient encore plus ouvert aux autres et à une perspective de formation continue, afin d'améliorer ou de conforter sa pratique, tout en rompant l'isolement qu'il peut ressentir dans sa classe. Il franchit alors une autre phase dans son propre développement professionnel.

Tout compte fait, le développement professionnel passe non seulement par la mise à jour constante des savoirs et des compétences, mais aussi par une capacité collective d'auto-organisation de la formation continue. [Tardif, M. et C. Gauthier]

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