collection d'art moderne



TΩte-moustaches et bouteilles, 1929

Jean Arp
Huile sur bois dΘcoupΘ et collΘ sur bois

80 x 100 x 3 cm
Achat de l'╔tat 1962, attr. 1963

salle 16 : Arp, Dada
N░ d'inventaire : AM 1370 S

En 1929, pour sa rentrΘe α Paris, Arp sΘlectionne une sΘrie de reliefs inaugurant la nouvelle galerie Goemans rue Bonaparte amΘnagΘe par Sophie Taeuber. Les reliefs de cette date portent en gΘnΘral des titres qui combinent des ΘlΘments vestimentaires : Plastron et cravate, Nez et cravate, Constellations de cravates et de nombrils, et associent avec humour des tΩtes avec des attributs accusant la masculinitΘ : TΩte, yeux, nez, moustache - Moustache sans fin - Bouteille et cravate. Parmi ces reliefs de grand format, TΩte-moustaches et bouteilles (...) devait particuliΦrement retenir l'attention (...).
Il faut prendre avec beaucoup de circonspection les allusions de Arp au mode d'exΘcution de ces sortes de collages lorsqu'il dit avoir confectionnΘ en une nuit la sΘrie de reliefs exposΘe en 1928 α la galerie Le Centaure de Bruxelles, ou quand il prΘtend que seul le savoir-faire du menuisier avait permis α ses caprices plastiques de prendre forme dans le bois clair, poli comme une glace : il y a lα coquetterie dada∩ste, une petite rouerie de poΦte pour renforcer le caractΦre d'extrΩme simplicitΘ de tels reliefs.

TΩte-moustaches et bouteilles
est bΓti comme un panneau de meuble. Il se compose d'un fond opaque encadrΘ de baguettes coupΘes α l'onglet qui soulignent la rΘgularitΘ d'une forme gΘomΘtrique rectangulaire. Trois ΘlΘments dΘcoupΘs s'inscrivent en relief sur le fond blanc : la paire de moustaches et deux bouteilles, mais seuls les jeux de lumiΦre et d'ombre dus au relief permettent de distinguer ces derniΦres, peintes du mΩme blanc cassΘ que le fond et le cadre. La tΩte, en revanche, est simplement peinte en bleu sur le fond d'o∙ se dΘtachent les yeux blancs en rΘserve. On sait l'extrΩme mΘticulositΘ avec laquelle Arp procΘdait au choix des couleurs, au calcul des contrastes ; de mΩme est intentionnel l'effet ludique de l'ensemble : outre le jeu de mots qui compose le titre, il y a un vΘritable jeu de trompe-l'oeil crΘΘ entre ce qui se dΘtache en relief et ce qui "tache" en couleurs. Arp abandonnera d'ailleurs par la suite l'artifice, l'illusionnisme du contraste colorΘ - dans l'austΦre sΘrie des Configurations et des Constellations - pour adopter une monochromie d'un blanc Θclatant. Rejoignant ainsi les recherches ultimes des plus abstraits, l'immaculΘe blancheur des Mondrian, Vantongerloo, Van Doesburg, il s'attache α dΘpasser toujours l'Θtroitesse des formulations, de la combinaison limitΘe des constructions gΘomΘtriques. Bien qu'il ait tenu α participer aux premiΦres grandes manifestations de Cercle et CarrΘ en 1930 et d'Abstraction-CrΘation en 1939, son oeuvre reste toujours empreinte d'une poΘsie α rΘsonance dada∩ste, ce qui lui vaut l'amitiΘ des surrΘalistes. Il pratique un jeu de formes ΘlΘmentaires mais amorphes, proches des formes du monde biologique. Chacun des reliefs de cette pΘriode parvient α la synthΦse de l'univers plastique et de l'univers onirique.

C. D.
Extrait de La Collection du MusΘe national d'art moderne, sous la direction d'AgnΦs de la Beaumelle et Nadine Pouillon, Paris, Editions du Centre Georges Pompidou, 1986.



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